Recourir à la médiation pour régler un contentieux avec un distributeur étranger.

Les relations commerciales avec un distributeur sont exposées à de nombreux risques contentieux : non-respect des minimums d’achats, concurrence déloyale, atteinte aux droits de propriété intellectuelle, résiliation brutale ou abusive, déréférencement…
Autant de sujets susceptibles de nuire à une marque soucieuse d’optimiser la commercialisation de ses produits.

Le distributeur défaillant bénéficiant toujours du « toss », en l’occurrence de l’avantage de devoir être assigné, le rétablissement de la marque dans ses droits souffre systématiquement du temps judiciaire, qui n’est pas le temps des affaires. Il lui faut en effet attendre plusieurs mois (pour les procédures d’urgence) et plusieurs années (pour les procédures au fond) avant d’obtenir réparation.

Il n’existe aucune formule contractuelle à ce jour, même parmi celles proposées par les algorithmes des nouveaux fabricants de contrats, susceptible de garantir à une marque l’obtention immédiate d’une réparation de son préjudice ou d’une solution contraignante. Le temps s’immiscera toujours dans la quête de la solution judiciaire. 

Il est toujours possible d’aboutir à une transaction par l’intermédiaire des conseils et c’est heureux. Hélas, il arrive trop souvent que le besoin d’avoir raison d’une des parties, voire des deux, rende impossible le dialogue nécessaire à la recherche de la solution négociée.

Cette difficulté à dialoguer est exacerbée lorsque les parties sont de langues et de cultures différentes. Pour peu que, dans le cadre de la négociation des conditions de leur collaboration, elles aient choisi de confier le règlement de leurs différends à une juridiction arbitrale, le coût de la procédure devient vite un obstacle à l’action judiciaire.

La médiation est un mode de règlement des conflits très adapté pour une marque souhaitant éviter une procédure longue et coûteuse. Mieux, elle peut permettre parfois de poursuivre la relation commerciale avec ce partenaire qu’elle connaît depuis si longtemps et qu’elle apprécie, malgré ce récent différend. Lui faire passer ce message n’est jamais simple. La médiation est le bon outil pour cela. Certains mal informés y verront l’aveu d’une faiblesse. Ils ont tort, souvent aveuglés par le souci d’avoir raison. Différencier ce dont la marque a besoin de ce que son management veut est une des taches du médiateur.

Outre sa rapidité et son coût raisonnable, la médiation présente l’avantage d’être confidentielle, de sorte que, si elle échoue, aucune partie ne pourra utiliser devant une juridiction les éléments échangés à cette occasion.

Formé et agréé par des organismes professionnels reconnus, le médiateur conduit le processus de médiation. Par l’écoute, l’empathie et le recours à la négociation raisonnée, il aide les parties à formuler leurs besoins pour qu’elles puissent trouver ensemble leur solution. Neutre, indépendant, impartial et soumis à un Code de conduite, il n’intervient jamais en tant que technicien ou « sachant » dans l’élaboration même de la solution. L’accord ainsi trouvé, et rédigé par les avocats des parties, a la force d’un contrat car il exprime leur volonté. Il présente aussi l’avantage d’être établi sur mesure, ce qu’une décision judiciaire ne permet pas d’obtenir, notamment pour, mettre fin à une relation commerciale ancienne, organiser un accord de déréférencement partiel, renégocier les volumes d’achat minimum, les conditions d’une
exclusivité… 
Le recours à la médiation peut être décidé par les parties concernées, soit au stade du contrat, soit lors de la survenance du différend. Il est toutefois recommandé de l’anticiper en insérant une clause de médiation au contrat, tant le conflit peut empêcher les parties de s’entendre sur le recours à ce mode de règlement. En l’absence d’une telle clause, il est fréquent aujourd’hui que le juge, au jour des plaidoiries, propose aux parties de régler un contentieux de plusieurs années en optant pour la médiation. Ce timing est rarement le bon pour des parties chauffées à blanc par le débat contradictoire et désireuses d’en découdre, prenant le risque de l’aléa judiciaire. Aussi, choisir de recourir à la médiation très tôt dans le conflit est essentiel à son succès.

La médiation peut être organisée par l’intermédiation d’un organisme dédié (ICC, CMAP, CEDR, CDR…) ou directement par les parties qui désignent d’un commun accord leur médiateur.

Dans les contentieux avec un partenaire étranger, il peut être judicieux de désigner des co-médiateurs natifs de chaque pays présent à la médiation. Ceci facilite une meilleure compréhension des langues et cultures. Trop de conflits sont dus à une incompréhension des comportements de son interlocuteur qui ne fait qu’appliquer les modes de fonctionnement propres à sa culture.

Aujourd’hui, plus de 80% des contentieux confiés à un médiateur agréé aboutissent à une solution négociée durable. Il serait dommage de se priver d’une telle opportunité.

« Par-delà les idées du bien et du mal, il y a un champ. Je t’y retrouverai. » 
(Proverbe soufi)

Julien Rivet
Avocat au Barreau de Paris
Spécialiste en droit de la distribution
Médiateur agréé CMAP (Centre de Médiation et d’Arbitrage de Paris) & CEDR (Center for Effective Dispute Resolution - London).

Article initialement publié dans le Journal du Management Juridique n°63.

Rédaction du site des Experts de l’entreprise.