En accompagnant les chefs d’entreprise dans leurs diverses problématiques, qu’elles soient liées au fait de subir un contrôle fiscal ou à l’ouverture de procédures collectives, on découvre parfois des situations quasi incroyables et des dirigeants qui vont tout droit vers la catastrophe.
Beaucoup d’entreprises viennent voir leur conseil en tenant un discours de ce style :
« L’entreprise vient d’être mise en redressement ou en liquidation judiciaire, mais ne vous inquiétez pas pour moi, je n’ai plus rien à voir là-dedans, je ne suis plus gérant depuis un, deux ou trois mois ; j’ai vendu les parts de société, actif et passif, et finalement, c’est maintenant le nouveau dirigeant qui reprend toute la responsabilité ».
Est-ce que cette information est vraie ? Non, pas du tout, elle est fausse. Autrement dit, lorsque vous êtes dirigeant d’une entreprise, que vous voyez que votre entreprise commence à avoir des difficultés, ou qu’elle risque d’en avoir dans les tous prochains mois, ne pensez pas qu’en changeant de gérance, en sortant de la représentation légale, voire en cédant vos titres, cela va vous immuniser contre les fautes passées.
C’est souvent même l’effet contraire qui est créé en n’affrontant pas le problème et en jouant la politique de la chaise vide, consistant à laisser venir un nouveau dirigeant à votre place, fraîchement désigné. En réalité, les absents ont toujours tort, et en fait votre nom va plus être mis en avant, votre démarche paraîtra suspecte et l’on tendra plus à rechercher les fautes que vous auriez commises que si vous assumez la responsabilité de la situation.
Le conseil que je peux donner au dirigeant d’une entreprise qui commence à rencontrer des difficultés et se dirige tout droit vers la cessation des paiements, est de ne certainement pas quitter la représentation légale dès qu’il y a un contrôle fiscal, ou dès qu’elle commence à être en difficulté ; mais plutôt au contraire, de continuer à tenir son poste et d’accompagner éventuellement la mise en redressement de l’entreprise ou la mise en liquidation de l’entreprise.
En effet, c’est souvent mieux perçu et aussi mieux défendu que d’avoir des dirigeants qui se sauvent quelques semaines ou quelques mois avant l’échéance.
On rencontre d’ailleurs toutes sortes de situations ; on voit des gens qui pensent même être une bonne solution de faire des cessions antidatées ou des changements de représentations légales, des changements de gérant ou de président antidatés.
Cependant, ce type de tentatives produit un effet catastrophique pour le dossier, c’est pire que de ne rien faire du tout.
Par conséquent, n’allez pas dépenser de l’argent pour payer un gérant de paille qui va reprendre la gérance de votre entreprise et les parts, et vous dira qu’il a repris actif et passif. C’est de l’argent pour rien, c’est de l’argent perdu.
Mieux vaut plutôt bien auditer votre situation et trouver des réponses et des arguments pour expliquer le problème, plutôt que de faire cela.
Frédéric Naïm, avocat fiscaliste,
Barreau de Paris.