Annoncé il y a un an par François Hollande, le projet de loi Sapin II, dit projet de loi sur « la transparence de la vie économique », devrait-être transmis au Conseil d’Etat dans les prochains jours et débattu à l’Assemblée Nationale courant avril 2016.
Dans sa dernière version, ce texte prévoit la création d’une agence nationale de détection et de prévention de la corruption, qui remplacerait donc l’actuel service central de prévention de la corruption. L’agence aurait un pouvoir d’enquête et bénéficierait d’une harmonisation législative et règlementaire des dispositifs de protection des lanceurs d’alerte (whistleblowing). A cet égard la nouvelle agence devrait disposer de moyens pour protéger les lanceurs d’alerte en saisissant elle-même la justice si les salariés d’une entreprise hésitent à le faire en leur propre nom.
L’agence serait également chargée de contrôler la bonne mise en place des programmes de prévention de la corruption que toute entreprise de plus de 500 salariés et de plus de 100 millions d’euros de chiffre d’affaire devra établir, sous peine d’amende pouvant aller jusqu’à un million d’euros.
Le texte prévoirait également l’instauration en France du système anglo-saxon de justice transactionnelle. Cette nouvelle forme de transaction pénale se distinguerait de l’actuelle Comparution sur Reconnaissance Préalable de Culpabilité (CRPC), aussi appelée « plaider coupable », qui ne permet pas aux entreprises d’échapper à une condamnation pénale mais de seulement réduire la peine.
« Outre les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, le système de justice transactionnelle existe déjà dans bon nombre de pays d’Europe continentale, tels que les Pays-Bas, la Suisse ou encore l’Allemagne. Les accords transactionnels conclus dans ce cadre ont ainsi un double objectif : sanctionner l’entreprise mise en cause et prévenir le renouvellement des faits par la mise en place de programmes de conformité sous la surveillance d’un moniteur indépendant pendant une durée de trois ans en moyenne », commente Olivier Lopez, Avocat Associé au cabinet Cohen & Gresser.
« En pratique, les entreprises pourraient échapper aux poursuites pénales contre le paiement d’une amende qui serait calculée de manière proportionnée aux avantages des manquements constatés et ne pourra excéder 30% du chiffre d’affaires moyen de l’entreprise concernée au cours des trois dernières années. A titre de comparaison, il n’y a au Royaume-Uni aucun plafond légal au montant des amendes qui peuvent être prononcées contre les entreprises pour des faits de corruption. Tandis qu’aux Etats-Unis, le plafond de deux millions de dollars prévu en principe par la loi américaine relative à la corruption internationale (le FCPA) souffre de nombreuses exceptions comme l’illustrent les multiples et importantes condamnations qui ont pu être prononcées (à titre d’exemple : Alstom 772 millions de dollars en 2014, Total 398 millions de dollars en 2013, Technip 245 millions de dollars en 2010) », ajoute-t-il.
(Source : Cohen & Gresser)