Si les voyages organisés, appelés aussi voyages au forfait, présentent plusieurs avantages (gain de temps, tranquillité d’esprit, itinéraires sur-mesure…), il arrive parfois que tout ne se passe comme prévu. Vol annulé au dernier moment, prestations modifiées, hôtels délabrés… Les vacances peuvent virer au cauchemar.
Pour faire face à certaines dérives, une directive européenne de 2015 a été transposée en droit français et intégrée dans le code du commerce par l’ordonnance n° 2017-1717 du 20 décembre 2017 portant transposition de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées. Ces nouvelles dispositions modifient de manière importante la réglementation des voyages organisés. Elles renforcent la protection des voyageurs en matière d’obligation d’information, d’exécution du contrat de voyage ou d’insolvabilité des professionnels. Cette réforme est applicable depuis le 1er juillet 2018 et s’appliquent donc à tous les nouveaux contrats.
Une définition élargie du service de voyage et du voyage au forfait.
L’article 1er de l’ordonnance du 20 décembre 2017 précité a réécrit totalement l’article L. 211-2 du code du tourisme.
Aux termes du nouvel article L. 211-2.-I. constitue un service de voyage :
« 1° Le transport de passagers ;
2° L’hébergement qui ne fait pas partie intégrante du transport de passagers et qui n’a pas un objectif résidentiel ;
3° La location de voitures particulières, d’autres véhicules de catégorie M au sens de l’article R. 311-1 du Code de la route ayant une vitesse maximale par construction supérieure à 25 km/ h ou de motocyclettes au sens de l’article R. 311-1 du code de la route dont la conduite nécessite la possession d’un permis de conduire de catégorie A conformément aux dispositions de l’article R. 221-4 de ce même code ;
4° Tout autre service touristique qui ne fait pas partie intégrante d’un service de voyage au sens des 1°, 2° ou 3°. »
Aux termes du nouvel article L. 211-2 A du code du tourisme, constitue un forfait touristique la combinaison d’au moins deux types différents de services de voyage aux fins du même voyage ou séjour de vacances, dépassant vingt-quatre heures ou incluant une nuitée, si :
« 1° Ces services sont combinés par un seul professionnel, y compris à la demande du voyageur ou conformément à son choix, avant qu’un contrat unique incluant tous ces services ne soit conclu ;
2° Indépendamment de l’éventuelle conclusion de contrats séparés avec des prestataires de services de voyage individuels, ces services sont :
a) Soit achetés auprès d’un seul point de vente et choisis avant que le voyageur n’accepte de payer ;
b) Soit proposés, vendus ou facturés à un prix tout compris ou à un prix total ;
c) Soit annoncés ou vendus sous la dénomination de “ forfait ” ou sous une dénomination similaire ;
d) Soit combinés après la conclusion d’un contrat par lequel un professionnel autorise le voyageur à choisir parmi une sélection de différents types de services de voyage ;
e) Soit achetés auprès de professionnels distincts grâce à des procédures de réservation en ligne liées, lorsque le nom du voyageur, les modalités de paiement et l’adresse électronique sont transmis par le professionnel avec lequel le premier contrat est conclu à un ou plusieurs autres professionnels et lorsqu’un contrat avec ce ou ces derniers est conclu au plus tard vingt-quatre heures après la confirmation de la réservation du premier service de voyage. »
La réforme prend aussi en compte le développement des ventes de voyages en ligne avec la notion de prestation de voyage lié.
Outre la combinaison évoquée ci-dessus, le voyage lié concerne plusieurs services achetés auprès de différents professionnels dans le cadre de contrats séparés, mais liés. Concrètement, le professionnel du premier contrat facilite la réservation des autres services. Il transmet le nom du voyageur, les modalités de paiement et son courriel aux autres professionnels. Attention, il faut que les contrats supplémentaires aient été conclus au plus tard 24 heures après la confirmation de la réservation du premier voyage.
Des nouvelles obligations en matière d’information des voyageurs.
Conformément aux dispositions de l’article L. 211-8 du code du tourisme, les voyageurs ont droit à des informations claires et précises de la part du professionnel, que ce soit via un site internet ou de la part d’un agent de voyage. Ce dernier doit personnaliser l’offre et informer le voyageur sur :
La destination du voyage ;
L’itinéraire ;
Les dates et durées du séjour pour les transports ;
La langue parlée lors des excursions ;
Le prix total comprenant toutes les taxes et les frais supplémentaires éventuels ;
Les modalités de paiement ;
Les procédures de traitement des plaintes.
Ces informations doivent être communiquées aux clients potentiels avant qu’il y ait achat.
Article L. 211-8 du code du tourisme :
L’organisateur ou le détaillant informe le voyageur au moyen d’un formulaire fixé par voie réglementaire, préalablement à la conclusion du contrat, des caractéristiques principales des prestations proposées relatives au transport et au séjour, des coordonnées du détaillant et de l’organisateur, du prix et des modalités de paiement, des conditions d’annulation et de résolution du contrat, des informations sur les assurances ainsi que des conditions de franchissement des frontières. Ces informations sont présentées d’une manière claire, compréhensible et apparente. Lorsque ces informations sont présentées par écrit, elles doivent être lisibles.
Que se passe-t-il en cas de modification ou d’annulation du contrat ?
Si l’agent de voyage modifie des éléments essentiels du contrat comme le changement de dates, le client peut résilier le contrat sans frais et obtenir le remboursement des sommes versées. Les conditions de modification ou d’annulation du voyage doivent être prévues dans le contrat. Par exemple, une clause sur l’augmentation des prix doit être insérée dans le contrat. Il faut savoir qu’un professionnel peut augmenter les tarifs uniquement en cas de hausse de certains coûts, difficiles à anticiper :
Prix du carburant ;
Redevances et taxes ;
Et taux de changes.
Une majoration des tarifs est impossible moins de 20 jours avant le début du forfait. Si l’augmentation du prix est supérieure à 8 % du prix du voyage, le client peut mettre fin au contrat sans payer de frais de résiliation.
Mais en dehors de cette situation ou en dehors de circonstances exceptionnelles, comme une catastrophe naturelle, le client ne peut pas annuler le contrat sans perdre les sommes versées et doit payer des frais de dédommagement.
Si c’est l’organisateur qui annule le voyage, il doit rembourser l’intégralité des sommes versée au client. Ce dernier est aussi en droit de demander une indemnisation au moins égale à la pénalité qu’il aurait dû payer s’il avait lui-même annulé le voyage.
Quelle la responsabilité civile professionnelle du vendeur de forfait touristique ou de service de voyage ?
L’article L. 211-16-I dispose que le professionnel qui vend un forfait touristique est en principe responsable de plein droit de l’exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d’autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
De même, le professionnel qui vend un service de voyage est responsable de plein droit de l’exécution du service prévu par ce contrat, sans préjudice de son droit de recours contre le prestataire de service.
Cependant, le professionnel défaillant peut s’exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que le dommage est imputable soit au voyageur, soit à un tiers étranger à la fourniture des services de voyage compris dans le contrat et revêt un caractère imprévisible ou inévitable, soit à des circonstances exceptionnelles et inévitables.
Par ailleurs, le voyageur informe l’organisateur ou le détaillant, dans les meilleurs délais eu égard aux circonstances de l’espèce, de toute non-conformité constatée lors de l’exécution d’un service de voyage inclus dans le contrat.
Il peut également adresser des messages, des demandes ou des plaintes en rapport avec l’exécution du contrat directement au détaillant par l’intermédiaire duquel le voyage ou le séjour a été acheté. Le détaillant transmet ces messages, demandes ou plaintes à l’organisateur dans les meilleurs délais. Aux fins du respect des dates butoirs ou des délais de prescription, la date de réception, par le détaillant, des messages, demandes ou plaintes est réputée être la date de leur réception par l’organisateur.
Si l’un des services de voyage n’est pas exécuté conformément au contrat, l’organisateur ou le détaillant remédie à la non-conformité, sauf si cela est impossible ou entraîne des coûts disproportionnés, compte tenu de l’importance de la non-conformité et de la valeur des services de voyage concernés. Dans le cas où l’organisateur ou le détaillant ne remédie pas à la non-conformité, le voyageur peut demander une réduction de prix et, en cas de dommage distinct, des dommages et intérêts en application de l’article L. 211-17 du code du tourisme.
En outre, si l’organisateur ou le détaillant ne remédie pas à la non-conformité dans un délai raisonnable fixé par le voyageur, celui-ci peut en plus y remédier lui-même et réclamer le remboursement des dépenses nécessaires. Il n’est pas nécessaire que le voyageur précise un délai si l’organisateur ou le détaillant refuse de remédier à la non-conformité ou si une solution immédiate est requise.
Lorsqu’une part importante des services de voyage ne peut être fournie comme prévu dans le contrat, l’organisateur ou le détaillant propose, sans supplément de prix pour le voyageur, d’autres prestations appropriées, si possible de qualité égale ou supérieure à ceux spécifiés dans le contrat, pour la continuation du contrat, y compris lorsque le retour du voyageur à son lieu de départ n’est pas fourni comme convenu.
Il est précisé que lorsque les autres prestations proposées donnent lieu à un voyage ou séjour de qualité inférieure à celle spécifiée dans le contrat, l’organisateur ou le détaillant octroie au voyageur une réduction de prix appropriée.
A noter que le voyageur ne peut refuser les autres prestations proposées que si elles ne sont pas comparables à ce qui avait été prévu dans le contrat ou si la réduction de prix octroyée n’est pas appropriée.
Que faire en cas prestations dégradées ?
Il faut tout d’abord rassembler les preuves (des photos par exemple) et informer l’agent de voyage. Si les dysfonctionnements occasionnent des frais pour le client, celui-ci peut demander le remboursement. L’agent de voyage doit agir dans les meilleurs délais pour tenter de trouver une solution, si ce n’est pas le cas et que les dysfonctionnements constatés perturbent significativement le voyage, le client peut demander une réduction des prix, résilier le contrat et éventuellement demander des dommages et intérêts dans les conditions indiquées ci-dessus.
En cas de litige, il est conseillé d’effectuer une démarche amiable auprès du professionnel dans un premier temps. Le client rassemble tous les éléments de preuve en sa possession, décrit clairement dans un courrier les dysfonctionnements rencontrés et envoie ensuite ces éléments au professionnel par lettre recommandée avec accusé de réception.
Si la tentative de règlement amiable échoue, le client peut saisir le Médiateur Tourisme Voyage.
Ce médiateur a été institué dans le secteur du tourisme en application des dispositions de l’ordonnance n° 2015-1033 du 20 août 2015 relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation et du décret n° 2015-1382 du 30 octobre 2015 relatif à la médiation des litiges de la consommation.
En cas de publicité mensongère de la part du professionnel, le client peut saisir la Direction générale de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF).
L’ordonnance de 2018 en cours de ratification au Parlement.
L’ordonnance du 20 décembre 2017 doit être ratifiée par le Parlement pour constituer définitivement une norme législative, en rappelant que les dispositions d’une ordonnance demeurent de nature réglementaire jusqu’à la ratification de celle-ci par le législateur.
A cet effet un projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2017-1717 du 20 décembre 2017 portant transposition de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, a été présenté et déposé le 7 mars 2018 à la Présidence du Sénat, par Messieurs Edouard PHILIPPE, Premier ministre et Bruno LE MAIRE, ministre de l’économie et des finances.
Patrick Lingibé,
Avocat.