Lors de la création de son activité, un entrepreneur ne souhaitant pas constituer une société avait le choix entre deux modes d’exercices : entrepreneur individuel ou EIRL (entrepreneur individuel à responsabilité individuel). Contrairement au statut d’entrepreneur d’individuel, ce second choix permettait la création d’un patrimoine d’affectation distinct du patrimoine personnel de l’entrepreneur. La loi n°2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante supprime le statut de l’EIRL et propose un nouveau statut unique d’entrepreneur individuel.
Créé en 2010, le statut de l’EIRL n’a pas connu un grand succès.
Pour rappel, l’EIRL permettait à l’entrepreneur de protéger son patrimoine personnel sans constituer de société, en effectuant une déclaration d’affectation. Cette déclaration devait dresser la liste des biens qu’il décidait d’affecter à l’exercice de son activité professionnelle. L’avantage indéniable résidait en la protection des biens personnels car ils n’étaient pas affectés à l’activité professionnel. En cas d’impayés, les créanciers ne pouvaient saisir que les biens affectés.
Les règles de la déclaration d’affectation du patrimoine ont été aménagées et allégées à plusieurs reprises afin d’inciter à l’usage de ce statut. La loi PACTE de mai 2019 a ainsi admis que l’entrepreneur puisse débuter son activité en EIRL avec un patrimoine d’affectation nul.
Ces aménagements n’ont pas rendu plus attractif ce statut de l’EIRL. En effet, les obligations comptables de l’EIRL demeuraient contraignantes : la tenue d’une comptabilité commerciale était obligatoire quel que soit le régime fiscal, les comptes annuels devaient être déposées annuellement au greffe du tribunal de commerce.
La loi du 14 février 2022, publiée au journal officiel le 15 février 2022, a supprimé ce statut de l’EIRL dont l’utilité fut plutôt mitigée et propose un statut unique aux nombreux avantages.
C’est une véritable simplification qui est proposée. En effet, le nouvel article L526-22 du code de commerce opère désormais une distinction automatique entre le patrimoine professionnel et le patrimoine personnel de l’entrepreneur individuel. Seuls les éléments du patrimoine dits « utiles » à l’activité professionnel constitueront le patrimoine professionnel pouvant être saisis par les créanciers, sauf conventions contraires.
Le code des procédures civiles d’exécution est également modifié en ce sens, puisque l’article L161-1 dudit code dispose que les créanciers professionnels ne pourront engager une procédure d’exécution qu’à l’encontre du patrimoine professionnel.
Par exception, en cas de manœuvres frauduleuses ou d’inobservation grave et répétée des obligations fiscales ou sociales par l’entrepreneur, les créanciers fiscaux et sociaux pourront agir sur l’ensemble des patrimoines professionnel et personnel (article L526-24 du code de commerce).
En cas de cessation d’activité ou de décès, les deux patrimoines sont réunis.
En cas de liquidation judiciaire, seul le patrimoine professionnel pourra être réalisé par le liquidateur. Le patrimoine personnel ne pourra être concerné qu’à la demande du débiteur et avec l’autorisation du juge-commissaire ou du tribunal (article L642-22 du code de commerce).
Ces nouvelles dispositions ne concernent que les créations d’entreprise pour l’avenir. Les personnes exerçant leur activité sous le régime de l’EIRL à la date de publication de la présente loi demeureront régies par les anciens textes dans leur nouvelle rédaction (articles L526-5-1 à L526-21 du code de commerce).
Chloé Sanchez, Juriste.
Article initialement publié sur le site Village de la Justice