Le Cabinet d’avocat Amado vous informe notamment sur les actualités juridiques des domaines suivants : Droit des contrats, Droit du travail, Droit des contrats, Droit commercial, concurrence, et consommation, Libertés publiques,…
Droit du travail :
• Contrat d’apprentissage - Rupture. Cass., Soc., 25 octobre 2017, N° 16-19608.
http://www.expertsdelentreprise.com/membres?vue=articles&id_article=new#
https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000035925417&fastReqId=835340256&fastPos=17
M. X…, né en 1997, a été engagé comme apprenti boulanger le 1er septembre 2013 par M. Y… pendant plus de huit mois, contrat rompu d’un commun accord puis engagé par M. Z… à compter du 25 juillet 2014 jusqu’au 31 août 2015 pour deux ans afin de continuer sa formation de boulanger, la période d’essai expirant le 25 août 2014. L’apprenti ayant refusé la proposition faite le 5 septembre 2014 d’une rupture d’un commun accord avec effet le lendemain, son employeur a saisi la juridiction prud’homale en résiliation judiciaire pour faute grave de l’apprenti.
Il résulte des dispositions de l’article L. 6222-18 du code du travail, dans sa rédaction alors en vigueur, que son alinéa 1er prévoyant la rupture du contrat d’apprentissage par l’une ou l’autre des parties au cours des deux premiers mois n’est pas applicable quand, après la rupture d’un contrat d’apprentissage, un nouveau contrat est conclu entre l’apprenti et un nouvel employeur pour achever la formation, seule pouvant être prévue dans cette hypothèse une période d’essai dans les conditions prévues à l’article L. 1242-10 du même code auquel renvoie le dernier alinéa de l’article L. 6222-18. Par ce motif de pur droit substitué après avis donné aux parties en application de l’article 1015 du code de procédure civile, la cour d’appel a légalement justifié sa décision.
Lorsqu’un nouveau contrat est conclu entre l’apprenti et un nouvel employeur pour achever la formation, seule peut être prévue une période d’essai dans les conditions de celles applicables en matière de contrat à durée indéterminée ou déterminée selon la nature du contrat en cause.
• Licenciement disciplinaire - Faute grave. Cass., Soc., 25 octobre 2017, N° 16-11173.
Mme X…, engagée à compter du 3 octobre 2005 par la société YBC, employée à la date de son licenciement par la société Helpevia en qualité de responsable de région Nord-Picardie-Champagne-Nord-Est, a reçu un avertissement le 12 novembre 2009, été convoquée le 7 juillet 2010 à un entretien préalable à une sanction disciplinaire puis convoquée à nouveau le 23 à un entretien préalable à un licenciement avec mise à pied conservatoire et licenciée pour faute grave par lettre du 28 juillet 2010.
Il résulte de l’article L. 1235-1 du code du travail qu’il appartient au juge d’apprécier non seulement le caractère réel du motif du licenciement disciplinaire mais également son caractère sérieux.
La cour d’appel a pu estimer que l’utilisation parfois abusive de la carte de télépéage mise à la disposition de la salariée et le téléchargement sur l’ordinateur portable de fichiers personnels volumineux n’étaient pas constitutifs d’une faute grave, et, exerçant les pouvoirs qu’elle tient de l’article L. 1235-1 du code du travail, a décidé dans l’exercice de son pouvoir souverain, qu’ils n’étaient pas constitutifs d’une cause réelle et sérieuse.
• Transport aérien - Personnel navigant - Retenues sur salaire. Cass., Soc., 19 octobre 2017, N°16-11617.
M. X… a été engagé par la société Air France le 6 février 1999 en qualité de steward. En application d’une ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de grande instance de Bobigny le 27 mars 2014, dans le cadre d’un litige qui l’opposait à un syndicat, la société Air France a versé au salarié la somme de 11 532,54 euros au titre d’indemnités de repas et de frais, qu’en suite de l’infirmation de cette décision par arrêt de la cour d’appel de Paris du 27 octobre 2014, la société Air France a opéré des retenues sur le salaire de M. X… pour un montant total de 5 893,30 euros.
Pour enjoindre à l’employeur de cesser toute retenue mensuelle excédant le 1/10ème du salaire exigible, l’arrêt, après avoir constaté que les conditions de la compensation étaient réunies, retient que l’employeur a versé au salarié, en exécution de l’ordonnance de référé du 31 mars 2014, la somme brute de 11 532,54 euros à titre de rappels des indemnités de repas et de menus frais mentionnées à l’article 8.6 de la convention d’entreprise du personnel navigant commercial, qu’au sens des articles L. 3251-1 et suivants du code du travail cette somme correspond à des avances en espèces, qu’en conséquence, l’employeur ne pouvait effectuer des retenues excédant le 1/10ème du salaire exigible mensuellement.
En statuant ainsi, alors que le versement effectué en exécution d’une ordonnance infirmée lui confère un caractère indu, de sorte que les sommes versées ne constituent pas des avances en espèces obligeant l’employeur à opérer des retenues successives ne dépassant pas un dixième du montant des salaires exigibles et que la compensation peut s’opérer dans la limite de la fraction saisissable du salaire en application de l’article L. 3252-2 du code du travail, la cour d’appel a violé les articles L. 3251-3 et L. 3252-2 du code du travail les textes.
• Accident du travail - Lien avec l’activité professionnelle. Cass., Civ. 2ème, 12 octobre 2017, N°16-22481.
M. X… a déclaré à son employeur, la société Manufacture française des pneumatiques Michelin (l’employeur), avoir été victime d’un accident du travail survenu le 19 juillet 2013 à 3 heures du matin alors que, se trouvant en mission en Chine, il s’était blessé à la main après avoir glissé en dansant dans une discothèque.
L’employeur a transmis cette déclaration, accompagnée de réserves, à la caisse primaire d’assurance maladie du Puy-de-Dôme (la Caisse). Celle-ci ayant, après enquête, pris en charge l’accident au titre de la législation professionnelle, l’employeur a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale.
Le salarié effectuant une mission a droit à la protection prévue par l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale pendant tout le temps de la mission qu’il accomplit pour son employeur, peu important que l’accident survienne à l’occasion d’un acte professionnel ou d’un acte de la vie courante, sauf la possibilité pour l’employeur ou la caisse de rapporter la preuve que le salarié avait interrompu sa mission pour un motif personnel.
L’arrêt relève qu’en l’espèce, si la présence de M. X… dans une discothèque et l’action de danser dans celle-ci n’est pas un acte professionnel en tant que tel, vu sa profession, il n’en reste pas moins qu’il incombe à l’employeur de démontrer qu’il se trouvait dans cet établissement pour un motif personnel, la seule présence dans une discothèque ne pouvant suffire à démontrer qu’il n’existerait aucun lien entre celle-ci et l’activité professionnelle du salarié. Aucun des éléments versés aux débats ne permet d’exclure que M. X… se serait rendu en discothèque pour les besoins de sa mission en Chine, que sa présence en ce lieu aurait eu pour but, par exemple, d’accompagner des clients ou collaborateurs, ou de répondre à une invitation dans le cadre de sa mission. Ni l’intéressé, ni le témoin mentionné sur la déclaration d’accident, ni les personnes susceptibles de donner des informations à ce sujet n’ont été interrogés et que l’indication dans le courrier de réserves que M. X… se serait rendu en discothèque "de sa propre initiative" ne résulte que d’une simple affirmation de l’employeur.
Ayant fait ressortir, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, que l’employeur ne rapportait pas la preuve que le salarié avait interrompu sa mission pour un motif personnel lors de la survenance de l’accident litigieux, ce dont il résultait que celui-ci bénéficiait de la présomption d’imputabilité au travail, la cour d’appel en a exactement déduit qu’il devait être pris en charge au titre de la législation professionnelle.
• Transport aérien - Grève - Information. Cass., Soc., 12 octobre 2017, N°16-12550.
Le Syndicat des pilotes d’Air France et deux autres syndicats de pilotes ont déposé un préavis de grève pour un mouvement ayant lieu du 15 au 30 septembre 2014. La société Air France a utilisé, pendant la période précédant la grève, les déclarations individuelles d’intention de grève du personnel afin de procéder à une réorganisation anticipée du service par la reconstitution d’équipages pour les vols prévus le 15 septembre et les jours suivants. Le 15 septembre 2014, le Syndicat des pilotes d’Air France a fait citer la société Air France devant le juge des référés afin de lui enjoindre de faire cesser toute utilisation des informations recueillies grâce aux déclarations individuelles des grévistes à d’autres fins que celles autorisées par la loi.
D’une part, il résulte des dispositions de l’article L. 1114-3 du code des transports issues de la loi n° 2012-375 du 19 mars 2012 qu’en cas de grève et pendant toute la durée du mouvement, les salariés dont l’absence est de nature à affecter directement la réalisation des vols informent, au plus tard quarante-huit heures avant de participer à la grève, le chef d’entreprise ou la personne désignée par lui de leur intention d’y participer et que les informations issues des déclarations individuelles des salariés ne peuvent être utilisées que pour l’organisation de l’activité durant la grève en vue d’en informer les passagers.
Il résulte d’autre part de l’article L. 1114-7 du code des transports qu’en cas de perturbation du trafic aérien liée à une grève dans une entreprise ou un établissement chargé d’une activité de transport aérien de passagers, tout passager a le droit de disposer d’une information gratuite, précise et fiable sur l’activité assurée, cette information devant être délivrée aux passagers par l’entreprise de transport aérien au plus tard vingt-quatre heures avant le début de la perturbation.
Ayant exactement retenu que ces dispositions, dont la finalité est l’information des usagers vingt-quatre heures à l’avance sur l’état du trafic afin d’éviter tout déplacement et encombrement des aéroports et préserver l’ordre public, n’autorisaient pas l’employeur, en l’absence de service minimum imposé, à utiliser les informations issues des déclarations individuelles des salariés afin de recomposer les équipages et réaménager le trafic avant le début du mouvement, la cour d’appel a légalement justifié sa décision.
Dans le cadre de la loi n° 2012-375 du 19 mars 2012 relative à l’organisation du service et à l’information des passagers dans les entreprises de transport aérien de passagers et à diverses dispositions dans le domaine des transports (JORF n°0068 du 20 mars 2012) codifiée sous l’article L.1114-3 du code des transports, si les salariés du transport aérien ont l’obligation d’informer leur employeur par écrit de leur intention de participer à une grève, ces informations ne peuvent être utilisées par l’employeur pour réorganiser de façon anticipée le service d’équipage et le trafic.
• Calcul des cotisations de sécurité sociale - Frais professionnels. Cass., Civ., 2ème, 12 octobre 2017, N°16-21469.
A l’issue d’un contrôle de la Société d’intervention en maintenance industrielle (la société) portant sur les années 2010 à 2012, l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (l’URSSAF) des Pays de la Loire a réintégré dans l’assiette des cotisations et contributions diverses sommes versées à titre de frais professionnels. La société a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale.
La divergence d’appréciation sur les règles d’assiette des cotisations n’est pas au nombre des contestations susceptibles de donner lieu à la procédure d’abus de droit prévue par l’article L. 243-7-2 du code de la sécurité sociale.
Il résulte de l’article 3, 3° de l’arrêté interministériel du 20 décembre 2002 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale que l’indemnité forfaitaire de repas n’est réputée utilisée conformément à son objet que si, notamment, le salarié qui la perçoit, en situation de déplacement professionnel, est empêché de regagner sa résidence ou son lieu habituel de travail.
L’arrêt retient que les contrats de mission des salariés intérimaires en cause indiquaient, d’une part, l’identité de l’entreprise utilisatrice, d’autre part, un lieu de mission unique, fixe et durable (chantier, site…) d’ailleurs distinct du siège de l’entreprise utilisatrice, que ledit lieu de mission unique, fixe et durable constitue effectivement le lieu de travail habituel de ces salariés.
De ces constatations procédant de son appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, faisant ressortir que les salariés temporaires avaient été embauchés pour travailler à titre permanent ou exclusif sur le chantier ou le site désigné dans le contrat de mission, la cour d’appel en a exactement déduit qu’ils ne pouvaient être considérés comme en situation de déplacement au sens du texte susmentionné de sorte que l’indemnité de repas qui leur était allouée ne pouvait être déduite de l’assiette des cotisations de la société.
• Calcul des cotisations de sécurité sociale - Bourses étudiants. Cass., Civ., 2ème, 12 octobre 2017, N°16-15663.}
Selon l’article L. 242-1, alinéa 1, du code de la sécurité sociale, pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l’occasion du travail ainsi que les avantages en argent et en nature.
A la suite d’un contrôle portant sur les années 2009 à 2010, l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales de Provence-Alpes-Côte d’Azur (l’URSSAF) a réintégré dans l’assiette des cotisations du groupement d’intérêt économique Eurecom (le GIE) le montant des bourses versées aux étudiants en doctorat, admis à préparer leur thèse. Le GIE a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale.
Pour dire que les doctorants accueillis par le GIE ne sauraient être assujettis au régime général dans le cadre des bourses qui leur sont allouées, l’arrêt énonce que peu importe que par ailleurs un contrat de travail lie le GIE à ces étudiants pour un travail à temps partiel, consistant en une activité d’enseignement auprès d’étudiants de niveau moins élevé, ce contrat de travail qui a trait à une activité totalement différente de celle des bourses, ne concernant pas le présent litige, et n’a aucune incidence sur celui-ci .
En statuant ainsi, alors qu’il ressortait de ses constatations que ces bourses étaient versées aux doctorants à l’occasion d’un travail accompli dans un lien de subordination avec le GIE, de sorte qu’elles devaient entrer dans l’assiette de calcul des cotisations, la cour d’appel a violé le texte susvisé.
• Salarié protégé - Licenciement. Cass., Soc., 11 octobre 2017, N°16-14529.
M. X… a été engagé le 6 avril 2006 par la société Otor Velin aux droits de laquelle se trouve la société DS Smith Packaging Velin en qualité de directeur général. Il est conseiller prud’homme. Une modification de son contrat de travail lui a été proposée au mois de février 2009, qu’il n’a pas acceptée. Il a été convoqué le 3 mars 2009 à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 10 mars 2009. Il a saisi le 5 mars 2009 la juridiction prud’homale, aux fins de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail. Il a été licencié le 9 juin 2009, après autorisation donnée par l’inspecteur du travail le 5 juin 2009. Cette autorisation a été annulée par le tribunal administratif le 12 avril 2011, en raison d’un vice de procédure.
Pour condamner la société à payer au salarié la somme de 489 567,30 euros à titre d’indemnité pour violation du statut protecteur et de 97 318,91 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul, l’arrêt retient que la décision du tribunal administratif fondée sur un moyen de légalité externe n’a aucune autorité sur la question de la résiliation, qui s’appuie sur la modification du contrat de travail qu’aurait imposée la société, que c’est à juste titre que le salarié, qui avait saisi la juridiction du travail avant la notification du licenciement, se fonde à titre principal sur la résiliation du contrat de travail, puisque l’annulation de l’autorisation de l’inspection du travail a été prononcée le 12 avril 2011, qu’une modification du contrat de travail imposée au salarié s’analyse comme un manquement de l’employeur à ses obligations suffisamment grave pour empêcher la poursuite de la relation de travail et fonder la résiliation, et que lorsque la résiliation judiciaire du contrat de travail d’un salarié titulaire d’un mandat électif ou de représentation est prononcée aux torts de l’employeur, la rupture produit les effets d’un licenciement nul pour violation du statut protecteur.
Le contrat de travail du salarié protégé, licencié sur le fondement d’une autorisation administrative ensuite annulée, et qui ne demande pas sa réintégration, est rompu par l’effet du licenciement. Lorsque l’annulation est devenue définitive, le salarié a droit, d’une part, en application de l’article L. 2422-4 du code du travail, au paiement d’une indemnité égale à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l’expiration du délai de deux mois suivant la notification de la décision d’annulation, d’autre part, au paiement des indemnités de rupture, s’il n’en a pas bénéficié au moment du licenciement et s’il remplit les conditions pour y prétendre, et de l’indemnité prévue par l’article L. 1235-3 du code du travail, s’il est établi que son licenciement était, au moment où il a été prononcé, dépourvu de cause réelle et sérieuse. Ces dispositions font obstacle à ce que la juridiction prud’homale se prononce sur la demande de résiliation judiciaire formée par le salarié protégé, même si sa saisine est antérieure à la rupture.
En statuant comme elle a fait, la cour d’appel a violé les articles L. 2422-4, L. 2411-1 et L. 2411-22 du code du travail, et l’article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause.
• Salarié protégé - Licenciement. Cass., Soc., 11 octobre 2017, N°16-60295 et 16-11048.
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M. X…, engagé par la société SFIP le 4 décembre 2007 en qualité d’agent de sécurité et dont le contrat de travail a été transféré à la société BSL sécurité à compter du 1er décembre 2013, a été désigné le 20 mars 2014 par le syndicat Sud solidaires prévention et sécurité, (le syndicat Sud) en qualité de représentant de section syndicale au sein de l’Unité économique et sociale formée par les sociétés BSL Paris et BSL entreprise privée de gardiennage et de sécurité (l’UES). Le salarié a été convoqué par une lettre du 16 juin 2014 à un entretien préalable à un éventuel licenciement. Par un jugement du 3 juillet 2014, le tribunal d’instance a annulé la désignation précitée. Par une lettre du 7 juillet 2014, le syndicat Sud a désigné à nouveau le salarié en qualité de représentant de section syndicale au sein de l’UES. Par une lettre du 15 juillet 2014, la société BSL sécurité l’a licencié pour faute grave. Le salarié a saisi la formation des référés de la juridiction prud’homale. Le syndicat Sud est intervenu volontairement à cette instance.
Pour dire n’y avoir lieu à référé sur les demandes du salarié en réintégration dans ses fonctions, en paiement des salaires non perçus à compter de sa mise à pied irrégulière et sur la demande de provision du syndicat, l’arrêt retient que lors de l’envoi de la lettre de licenciement du 15 juillet 2014, la désignation du 20 mars 2014 du salarié en qualité de délégué syndical se trouvait rétroactivement anéantie par l’effet de l’annulation prononcée par le tribunal d’instance. La désignation suivante du 7 juillet 2014 ne pouvait permettre à ce dernier de bénéficier de la procédure spéciale de licenciement, prévue par les articles L. 2411-3 et L. 2421-1 du code du travail, dès lors qu’elle avait été notifiée à l’employeur après la convocation du salarié à l’entretien préalable au licenciement. Dans ces conditions, les demandes du salarié qui ne peut se prévaloir d’aucun trouble manifestement illicite, faute de justifier du statut de salarié protégé, se heurtent à une contestation sérieuse.
L’annulation par le tribunal d’instance de la désignation d’un représentant de section syndicale n’ayant pas d’effet rétroactif, la perte du statut protecteur n’intervient qu’à la date à laquelle le jugement d’annulation est prononcé, de sorte que l’autorisation administrative de licenciement est requise lorsque le salarié bénéficie de la protection à la date d’envoi de la convocation à l’entretien préalable au licenciement.
En statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé les articles L. 2142-1-2 et L. 2421-1 du code du travail.
• Représentant du personnel - Ancienneté requise. Cass., Soc., 11 octobre 2017, N°16-60295.
Mme X…a été engagée le 10 septembre 2002 par la société Colas Midi Méditerranée. Par lettre du 31 mai 2016, le syndicat CFDT construction et bois a informé la société de la désignation de la salariée en qualité de représentant syndical au comité d’établissement de l’agence Colas Marseille au sein de laquelle elle était affectée depuis le 1er janvier 2016. Par lettre du 1er juin 2016, la société a convoqué la salariée à un entretien préalable à un éventuel licenciement. Le 15 juin 2016, elle a sollicité l’annulation de la désignation, invoquant son caractère frauduleux et soutenant que la salariée n’avait pas une ancienneté suffisante dans l’établissement.
Selon les articles L. 2324-2 et L. 2324-15 du code du travail, ne peut être désigné représentant syndical au comité d’établissement qu’un salarié qui y est éligible. L’ancienneté acquise par le salarié au sein de l’entreprise, quels que soient les établissements où il a été successivement affecté, doit être prise en compte pour le calcul de l’ancienneté requise pour être éligible dans l’un de ces établissements.
Ayant constaté que la salariée travaillait dans l’entreprise depuis plus d’un an à la date de la désignation litigieuse, la cour d’appel a exactement décidé qu’elle remplissait la condition d’ancienneté requise.
• Représentant du personnel - Licenciement - Entretien préalable. Cass., Soc., 11 octobre 2017, N°16-10139.
Engagée le 10 mai 1999 en qualité d’agent de montage par la société Mallinckodt, aux droits de laquelle se trouve désormais la société Sefam, Mme X… a informé cette dernière, par une lettre reçue le 29 avril 2013, de sa candidature au second tour de l’élection de la délégation unique du personnel, prévu le 28 mai 2013, la date limite de dépôt des candidatures étant fixée au 21 mai 2013. La salariée, après avoir été convoquée le 2 mai 2013 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, a été licenciée pour faute grave par une lettre du 21 mai 2013. Soutenant que son licenciement aurait dû être autorisé par l’inspecteur du travail, Mme X… a saisi la juridiction prud’homale afin que son licenciement soit déclaré nul et d’obtenir le paiement de diverses indemnités.
D’abord, si la protection prévue par l’article L. 2411-7 du code du travail, alors applicable, bénéficie au candidat aux fonctions de membres de la délégation unique du personnel, tant au premier qu’au second tour, et cela alors même qu’il aurait informé l’employeur de sa volonté de présenter sa candidature au second tour avant le déroulement du premier, la connaissance par l’employeur de l’imminence de sa candidature n’est de nature à le faire bénéficier de cette protection que jusqu’au dépôt de sa candidature pour le second tour.
Ensuite, pour l’application des dispositions susvisées, c’est au moment de l’envoi de la convocation à l’entretien préalable au licenciement que l’employeur doit avoir connaissance de la candidature du salarié ou de son imminence.
Ayant constaté qu’au moment de l’envoi de la lettre de convocation à l’entretien préalable de licenciement, la salariée avait préalablement informé l’employeur de sa candidature aux élections professionnelles, de sorte qu’à la date de cette convocation elle bénéficiait de la protection résultant de la connaissance par l’employeur de l’imminence de sa candidature, la cour d’appel a légalement justifié sa décision.
Pour bénéficier du statut protecteur, c’est au moment de l’envoi de la convocation à l’entretien préalable au licenciement que l’employeur doit avoir connaissance de la candidature d’un salarié aux élections professionnelles.
• Licenciement - Rappels de salaires. Cass., Soc., 6 octobre 2017, N°16-12743.
M. X…a été engagé en 1977 par l’association La Vie active (l’association) en qualité de secrétaire avant d’exercer les fonctions de chef de service responsable d’un établissement d’hébergement. Licencié le 9 décembre 2010 pour inaptitude et impossibilité de reclassement, il a saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes au titre de l’exécution et de la rupture de son contrat de travail.
Selon l’article 6 de l’annexe n° 6, intitulée « Dispositions spéciales aux cadres », à la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, sous réserve des dispositions de l’article 26 de la convention collective du 15 mars 1966, en cas d’arrêt de travail résultant de maladie, d’accident du travail, les cadres percevront, pendant les six premiers mois le salaire net qu’ils auraient perçu normalement sans interruption d’activité, pendant les six mois suivants le demi salaire net correspondant à leur activité normale. L’article 26 de la convention collective précise que la période de référence pour l’appréciation des droits est la période de douze mois consécutifs précédant l’arrêt de travail en cause.
Pour débouter le salarié de sa demande de rappel de salaires, l’arrêt retient qu’en application du contrat de travail sa rémunération mensuelle est constituée d’un traitement brut calculé par multiplication d’un coefficient à un taux horaire avant déduction des cotisations sociales, que les modalités de rémunération des astreintes ne figurent pas au contrat mais dans la convention collective des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées conclue le 15 mars 1966 prévoyant que le cadre en arrêt maladie perçoit pendant les six premiers mois le salaire net et les six mois suivants le demi salaire perçu normalement, que si l’avenant applicable aux cadres précise que certaines primes et indemnités suivront le sort du salaire, il n’existe rien de tel en ce qui concerne les indemnités d’astreinte, qu’en outre l’article 72 a) de la convention collective prévoit l’ajout au salaire brut d’un certain nombre d’indemnités mais pas celles relatives au paiement des astreintes, qu’il en résulte que les signataires de la convention collective n’ont pas entendu inclure les indemnités pour astreinte dans la base de calcul du complément versé par l’employeur au salarié en arrêt maladie et qu’au vu des pièces produites et notamment des bulletins de salaire le salarié a été entièrement rempli de ses droits.
En statuant ainsi, alors que les rémunérations versées au salarié à l’occasion des astreintes constituent une partie du salaire normalement perçu par celui-ci, la cour d’appel a violé l’article 6 de l’annexe n° 6, intitulée « Dispositions spéciales aux cadres », à la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, ensemble l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
Pour débouter le salarié de ses demandes relatives à l’existence d’un harcèlement moral et tendant à la condamnation de l’association au paiement de sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul, indemnité compensatrice de préavis et congés payés, l’arrêt retient que des faits sont établis et consistent en l’envoi du courriel du 7 septembre 2009 relatif à la vérification de la prise d’appel la plus rapide possible, du courriel du 4 septembre 2009 par lequel Mme Y…indique que le salarié a oublié de transmettre des documents et du courriel de M. Z…du 30 septembre 2009 par lequel il l’informe qu’il l’a inscrit à un stage et qu’il prend note qu’il a conscience de sa difficulté à gérer les situations difficiles, que pris dans leur ensemble, ces faits ne laissent pas présumer l’existence d’un harcèlement moral, qu’en effet, ces trois courriels s’étalent sur une très brève période, n’ont pas le même expéditeur, sont rédigés en des termes courtois, ne révèlent aucun abus dans l’exercice du pouvoir de direction et ont été rédigés dans le cadre de relations de service normales, sans esprit d’animosité et dans l’intérêt légitime de l’association.
En statuant ainsi, sans prendre en considération les documents médicaux produits par le salarié afin d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettaient de présumer l’existence d’un harcèlement moral, la cour d’appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail dans leur version applicable au litige.
Les rémunérations versées au salarié au titre de ses astreintes constituent une partie du salaire normalement perçu et doivent être prises en compte pour le maintien de salaire durant l’arrêt de travail. Les documents médicaux produits par le salarié doivent être pris en compte par juges du fond pour apprécier la présomption de harcèlement moral.
• Convention de forfait - Accord d’entreprise. Cass., Soc., 5 octobre 2017, N°16-23106, 16-23107, 16-23108, 16-23109, 16-23110 et 16-23111.
Mme X… et cinq autres salariés ont été engagés par la société BPI en qualité de consultant statut cadre. Leur contrat de travail stipulait une convention de forfait en jours en application d’un accord d’entreprise sur l’aménagement et la réduction du temps de travail des cadres consultants et administratifs du 19 janvier 2000. Les salariés ont saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes.
L’employeur fait grief à l’arrêt de dire inopposables aux salariés les conventions de forfait en jours et de le condamner au paiement de rappels de salaire au titre des heures supplémentaires alors, selon le moyen, qu’il résulte des stipulations de l’accord collectif d’entreprise du 19 janvier 2000 (production), que celui-ci précise la catégorie des cadres concernés par la convention de forfait en jours, prévoit les modalités de suivi de l’organisation du travail des cadres, de l’amplitude de leurs journées travaillées et de la charge de travail qui en résulte, détermine les modalités d’application des repos quotidiens et hebdomadaires, notamment à travers l’application d’un système de mesure de contrôle du nombre de jours travaillés, par saisine chaque semaine du temps de travail effectué, garantit que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assure une bonne répartition dans le temps du travail. En affirmant que cet accord collectif ne serait pas conforme aux exigences légales, la cour d’appel a violé l’article L. 3121-39 du code du travail, ensemble ledit accord collectif.
Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect de durées raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires.
Ayant relevé que les dispositions de l’accord d’entreprise sur l’aménagement et la réduction du temps de travail des cadres consultants et administratifs du 19 janvier 2000, lesquelles se bornent à prévoir que chaque salarié saisira son temps de travail hebdomadaire dans le système de gestion des temps appelé Gestaff, qu’un état récapitulatif du temps travaillé par personne sera établi chaque mois pour le mois M-2 et remis à sa hiérarchie, qu’une présentation sera faite chaque année au comité de suivi de cet accord, que le repos entre deux journées de travail est au minimum de 11 heures consécutives, et que le salarié bénéficiera au minimum d’une journée de repos par semaine, la cour d’appel en a exactement déduit que, faute de prévoir un suivi effectif et régulier par la hiérarchie des états récapitulatifs qui lui sont transmis, permettant à l’employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable, ces dispositions ne sont pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et n’assurent pas une bonne répartition, dans le temps, du travail des intéressés, et sont, par voie de conséquence, inopposables aux salariés.
Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect de durées raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires.
• Fermeture hebdomadaire - Arrêté préfectoral. Cass., Soc., 5 octobre 2017, N°15-23221.
La société France Marché, qui exploite une supérette ouverte le dimanche matin et fermée le lundi, a saisi la juridiction commerciale afin de faire cesser le trouble manifestement illicite qu’elle estime subir du fait de l’ouverture le dimanche matin du magasin exploité à proximité du sien par la société Aubins Saint-Prix à l’enseigne "Leclerc" en violation de l’arrêté préfectoral du 4 juin 1952, lequel prévoit que "seront totalement fermés au public, dans tous le département de Seine-et-Oise, le dimanche toute la journée, le lundi toute la journée ou le mercredi toute la journée, au choix des intéressés, les établissements (…) dans lesquels est vendue au détail de l’alimentation solide et liquide à emporter".
Pour dire n’y avoir lieu à référé, l’arrêt retient que s’il incombe à l’exploitant d’un magasin qui invoque l’exception d’illégalité de l’arrêté préfectoral de fermeture d’établir l’absence d’une majorité incontestable des professionnels concernés en faveur de l’accord sur lequel est fondé l’arrêté, au stade du référé, la contestation tenant à l’évolution depuis 1952 du contexte socio-économique et des structures professionnelles dans le département concerné apparaît suffisamment sérieuse pour faire obstacle à la constatation de l’existence d’un trouble manifestement illicite, qu’il n’est pas contesté que les organisations d’employeurs et de salariés dans le Val-d’Oise ne se sont jamais prononcées depuis la disparition du département de Seine-et-Oise en 1968, qui a conduit à une réduction significative de la zone géographique dans lequel l’arrêté, pris à l’origine sur la base d’un accord de branche vieux de plus d’un demi-siècle et couvrant une zone géographique nettement plus importante, continue à s’appliquer et enfin qu’il ne peut donc être sérieusement contesté que depuis 1936, date de la signature de l’accord professionnel, le contexte socio-économique ayant présidé à l’édiction de l’arrêté litigieux de 1952 s’est modifié, de même que les structures professionnelles ont évolué, et que se pose la question du maintien dans le Val-d’Oise d’une majorité indiscutable en faveur d’une réglementation sur la fermeture des établissements relevant du champ d’application de l’arrêté de 1952, de sorte que le caractère manifestement illicite du trouble allégué n’est pas caractérisé.
En statuant ainsi, alors qu’il n’était pas contesté que la société Aubins Saint-Prix ne respectait pas la fermeture hebdomadaire imposée par l’arrêté du 4 juin 1952, lequel demeure applicable tant qu’il n’a pas été abrogé, et que la violation d’un arrêté préfectoral de fermeture hebdomadaire dont la légalité n’est pas sérieusement contestée constitue un trouble manifestement illicite qu’il entre dans les pouvoirs du juge des référés de faire cesser, la cour d’appel a violé l’article L. 3132-29 du code du travail dans sa version alors applicable, ensemble l’article 873 du code de procédure civile.
La violation d’un arrêté préfectoral de fermeture hebdomadaire de 1952, dont la légalité n’est pas sérieusement contestée, constitue un trouble manifestement illicite qu’il entre dans les pouvoirs du juge des référés de faire cesser.
• Travail saisonnier - Requalification du contrat. Cass. Soc., 5 octobre 2017, N°16-13581, 16-13582, 16-13583 et 16-13584.
La société d’Exploitations spéléogiques de Padirac a engagé M. X…et trois autres salariés en qualité de guide-batelier par des contrats de travail saisonniers successifs. Jusqu’en 2007 la rémunération mensuelle fixe des salariés était, en vertu d’un accord " atypique " du 26 avril 1978, susceptible d’être complétée en fonction du chiffre d’affaires réalisé au cours de chaque saison. Cet accord ayant été dénoncé en 2008, l’employeur a mentionné dans les contrats conclus pour les saisons 2008 et 2009 que le salaire mensuel brut sera payé sur la base d’un taux horaire brut de 15 euros et a cessé de payer des compléments de salaire. Les salariés ont saisi la juridiction prud’homale pour obtenir la requalification des contrats à durée déterminée successifs en un contrat de travail à durée indéterminée et la condamnation de l’employeur au paiement de rappels de salaire.
Appréciant, hors toute dénaturation, la valeur et la portée des éléments de preuve, la cour d’appel, sans se fonder sur la seule référence dans les contrats de travail aux dispositions de l’accord du 26 avril 1978, a estimé qu’était établie la volonté claire et non équivoque de l’employeur de conférer au mode de rémunération prévu par cet accord une valeur contractuelle.
Pour faire droit à la demande de rappel de salaire, les arrêts retiennent, par motifs adoptés, que l’accord des salariés à la modification de leurs conditions de rémunérations ne peut résulter des contrats de travail à durée déterminée signés depuis 2008, sans effet puisque signés alors qu’un contrat à durée indéterminée était toujours en cours d’exécution.
En statuant ainsi, alors que la requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat, et qu’il lui appartenait d’apprécier la valeur et la portée sur la rémunération du salarié des différents contrats conclus par les parties, la cour d’appel a violé les articles L. 1245-1, L. 1221-1 du code du travail et 1134 alinéa 1er, devenu l’article 1103 du code civil.
• Accords collectifs - Clauses d’indexation des salaires. Cass, Soc., 5 octobre 2017, N°15-20390.
Le groupe Crédit mutuel Arkéa comprend une unité économique et sociale Arkade (UES) constituée de plusieurs fédérations du Crédit mutuel et de sociétés. L’UES a conclu avec les organisations syndicales une convention collective comportant un mécanisme d’augmentation générale des salaires. Cette convention a été appliquée jusqu’en 2013. La fédération CFDT des syndicats de banques et assurances, le syndicat national de la banque et du crédit, le syndicat UNSA du Crédit mutuel Arkéa et le syndicat CGT du personnel du Crédit mutuel de Bretagne (les syndicats) ont assigné devant le tribunal de grande instance les sociétés composant l’UES afin de voir ordonner une augmentation générale de salaire de 1,87 % à compter du mois de janvier 2013, sous astreinte de 1 600 euros par jour de retard et de les voir condamner à payer à chacune la somme de 10 000 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive et manquement à l’obligation de loyauté dans les négociations.
Il résulte des dispositions combinées des articles L. 112-2 du code monétaire et financier et L. 3231-2 du code du travail que sont interdites dans les conventions ou accords collectifs de travail toutes clauses prévoyant des indexations fondées sur le salaire minimum de croissance ou par référence à ce dernier, sur le niveau général des prix ou des salaires, ou sur le prix des biens produits ou services n’ayant pas de relation directe avec l’objet du statut ou de la convention ou avec l’activité de l’une des parties. De telles clauses sont frappées d’une nullité d’ordre public.
D’abord, ayant relevé que l’article 4-4-1-2 de la convention collective de l’UES prévoit des augmentations générales résultant de l’évolution du point Arkade et que l’évolution de ce point est en corrélation avec la croissance moyenne de l’indice Insee, la cour d’appel en a exactement déduit que, même si ce dispositif est conditionné par l’existence d’une marge nette de financement du développement de l’UES, la référence à l’évolution de la valeur de l’indice INSEE, même partielle, n’en constitue pas moins une clause d’indexation automatique prohibée.
Ensuite, la cour d’appel, qui a estimé qu’il n’était pas démontré que l’indice de substitution proposé recouvrait la totalité de l’activité économique des sociétés de l’UES, n’avait pas à effectuer une recherche que ses constatations rendaient inopérante.
Après avoir exactement rappelé qu’en application de l’article L. 3231-3 du code du travail, sont interdites dans les conventions ou accords collectifs de travail, les clauses comportant des indexations sur le salaire minimum de croissance, la cour d’appel qui a constaté que les articles 4-3-6 et 4-3-7 de la convention collective de l’UES, lesquels précisent les modalités permettant de déterminer la rémunération minimum garantie par l’accord collectif et décrivent un mécanisme d’évolution de cette rémunération qui est en lien à la fois avec l’évolution du Smic et la croissance moyenne de l’indice INSEE, a, sans avoir à faire d’autre recherche que ses constatations rendaient inopérantes, légalement justifié sa décision.
• Accident du travail - Indemnisation. Cass., Civ., 2ème, 5 octobre 2017, N°16-22353.
M. Xavier X…a été embauché le 20 mars 2000 en qualité de conducteur de machines sur pupitre par la société Bois du Dauphiné dont l’activité principale est le sciage et la transformation du bois. Cette société a souscrit une assurance garantissant sa responsabilité civile professionnelle auprès de la société Generali IARD jusqu’en 2009 puis à compter de l’année 2010 auprès de la société Axa France IARD. Après la survenance, le 14 octobre 2009, d’un incendie ayant endommagé les locaux de l’entreprise, M. Xavier X…a été chargé le 27 novembre 2009 de procéder au démontage d’une empileuse automatique de planches. Il a été victime à cette occasion d’un accident du travail, l’empileuse qu’il démontait s’étant brutalement abattue sur lui, occasionnant plusieurs traumatismes dont un au niveau du rachis cervical entraînant une paraplégie. Par jugement du 24 janvier 2013, un tribunal des affaires de sécurité sociale a notamment dit que l’accident résultait de la faute inexcusable de la société Bois du Dauphiné. Par un jugement du 28 janvier 2013, devenu irrévocable, un tribunal correctionnel a déclaré la société Bois du Dauphiné coupable de blessures involontaires ayant causé une incapacité de travail personnel supérieure à trois mois dans le cadre du travail et jugé cette société responsable du préjudice subi par M. Xavier X…Parallèlement, les proches de M. Xavier X…, à savoir ses parents, M. André X…et Mme Yolande Y…, épouse X…, ses frères, MM. Eric et Franck X…(les consorts X…) et son amie, Mme Z…, ont assigné la société Bois du Dauphiné et ses assureurs successifs en responsabilité et indemnisation de leurs préjudices.
Ayant relevé qu’aux termes des conditions particulières, la société Bois du Dauphiné avait déclaré exercer les activités suivantes : « achat de coupes de bois sur pied et chablis, abattage des arbres provenant de ces coupes et/ ou tronçonnage des bois, débardage et mise à port de camion, (…) tronçonnage, élagage d’arbres, sciage, écorçage, quarissage, le tout pour la fabrication de planches à cagettes, poutres, palettes » et constaté qu’en l’espèce l’accident était survenu alors que M. Xavier X…effectuait, à la demande de son employeur, une intervention sur une empileuse de planches, c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation de la nature des tâches rendues nécessaires par ces activités que la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à la recherche inopérante visée par la troisième branche du moyen, a jugé que l’utilisation de cette machine entrait dans le cadre des activités déclarées de l’entreprise qui comportaient, notamment, le sciage et la fabrication de planches et en a exactement déduit que la garantie de la société Generali IARD était due.
Si l’aménagement du logement de la victime pour l’adapter aux contraintes liées à son handicap constitue un préjudice qui lui est propre, les frais engagés par ses proches pour rendre leur logement accessible afin de pouvoir la recevoir, constituent un élément de leur préjudice économique.
C’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation que la cour d’appel a retenu que les parents de la victime justifiaient d’un préjudice résultant de la nécessité d’installer une rampe d’accès permettant à leur fils de leur rendre visite en fauteuil roulant et que son frère, M. Eric X…, était fondé à obtenir la prise en charge des frais d’adaptation d’une chambre en rez-de-chaussée.
Pour déclarer irrecevable la demande de Mme Z…en réparation d’une perte de revenus et de droits à la retraite, l’arrêt retient que cette demande est formée pour la première fois en appel et se heurte au principe d’irrecevabilité des prétentions nouvelles édicté par l’article 564 du code de procédure civile.
En statuant ainsi, alors que ces demandes ayant le même fondement que les demandes initiales et poursuivant la même fin d’indemnisation du préjudice résultant de l’accident survenu à M. Xavier X…constituaient le complément de celles formées en première instance par Mme Z…, la cour d’appel a violé les articles 565 et 566 du code de procédure civile.
• Accident du travail - Reclassement du salarié. Cass. Soc., 4 octobre 2017, N°16-16441.
M. X…, engagé le 1er juillet 2011 en qualité de conducteur de travaux par la société LJC bâtiment (la société), a été victime, le 7 novembre 2011, d’un accident du travail. A l’issue des examens médicaux des 29 avril et 13 mai 2014, le médecin du travail l’a déclaré inapte à son poste. Par jugement du 27 mai 2014, la liquidation judiciaire de la société sans poursuite d’activité a été prononcée, M. Y… étant désigné en qualité de liquidateur judiciaire. Le salarié a, le 11 juin 2014, été licencié pour motif économique.
Pour dire le licenciement nul et fixer la créance du salarié à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la société à des sommes à titre de dommages-intérêts et complément d’indemnité de licenciement, l’arrêt retient que le salarié ayant été déclaré inapte à son poste de travail le 13 mai 2014, suite à un accident du travail, il appartenait à l’employeur de mettre en œuvre la procédure prévue par l’article L. 1226-10 du code du travail et, notamment, de procéder, à compter de cette date, à des recherches en vue de parvenir à son reclassement, qu’il est constant qu’aucune recherche en ce sens n’a été effectuée, que ce soit avant l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire intervenue le 27 mai 2014 ou après et que le liquidateur s’est borné à mettre en œuvre la procédure de licenciement économique en convoquant le salarié à l’entretien préalable à son licenciement pour motif économique le 28 mai 2014, que le liquidateur invoque vainement les contraintes de temps résultant de la procédure de liquidation judiciaire alors qu’il ne justifie aucunement des démarches effectuées auparavant, qu’il apparaît, par conséquent, que les règles particulières aux salariés victimes d’un accident du travail, qui instituent une protection d’ordre public, n’ont pas été respectées et que le licenciement prononcé dans de telles conditions est nul.
En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que l’impossibilité de reclassement du salarié ressortissait à la cessation totale d’activité de l’entreprise mise en liquidation judiciaire sans poursuite d’activité et qu’il n’était pas prétendu que celle-ci appartenait à un groupe, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l’article L. 1226-10 du code du travail, dans sa rédaction applicable en la cause.
Lorsque l’avis d’inaptitude précède le licenciement pour motif économique, l’employeur est tenu de prendre en compte les préconisations du médecin du travail dans ses offres de reclassement. Il en est néanmoins dispensé lorsque l’impossibilité de reclassement ressort d’une cessation totale et définitive d’activité de l’entreprise.
• Licenciement pour motif économique - Ancienneté du salarié. Cass. Soc., 4 octobre 2017, N°15-27154.
M. X… a été engagé par la société Maziers Ing dans le cadre de contrats de chantier à compter du 3 mai 2004, son dernier contrat, en date du 1er février 2008, se poursuivant à durée indéterminée à l’arrivée de son terme. Il a été convoqué le 4 mars 2011 à un entretien préalable à un licenciement pour motif économique, auquel l’employeur lui a indiqué renoncer par lettre du 14 mars 2011. Par lettre du 30 mars 2011, M. X… a indiqué qu’il acceptait la convention de reclassement personnalisé qui lui avait été auparavant présentée. Par lettre recommandée avec accusé de réception du 20 juin 2011, intitulée « licenciement pour faute grave », l’employeur a reproché au salarié de contracter directement des prestations d’ingénierie auprès du principal client de l’entreprise. Le 28 juin 2011, M. X… a saisi la juridiction prud’homale, en référé et au fond, de diverses demandes afférentes à la rupture du contrat de travail. L’employeur a notifié au salarié un licenciement pour motif économique par lettre du 5 août 2011.
Ayant relevé, par une appréciation souveraine des faits, que le licenciement avait été notifié, sans être précédé d’un entretien préalable, pour des faits que l’employeur qualifiait de faute excessivement grave, au moyen d’une lettre recommandée adressée le 20 juin 2011 au salarié, la cour d’appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.
La détermination de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise à prendre en compte pour le calcul de l’indemnité conventionnelle de licenciement, l’article 12 de la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseil du 15 décembre 1987 ne subordonne pas la prise en compte des missions professionnelles effectuées par le salarié dans le cadre de contrats de chantier avant son recrutement par contrat à durée indéterminée, à l’exigence d’une présence continue du salarié dans l’entreprise.
• Accords collectifs - Différences de traitement entre salariés. Cass., Soc., 4 octobre 2017, N°16-17517 et 16-17518.
Les différences de traitement entre des salariés appartenant à la même entreprise mais à des établissements distincts, opérées par voie d’accords d’entreprise négociés et signés par les organisations syndicales représentatives au sein de l’entreprise, investies de la défense des droits et intérêts des salariés de l’ensemble de cette entreprise et à l’habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote, sont présumées justifiées de sorte qu’il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu’elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle
Le 1er septembre 2002 la société Ahlstrom La Gère a fait l’objet d’une opération de fusion absorption par la société Ahlstrom Packaging devenue la société Ahlstrom Label Pack devenue Munksjö Label Pack. La société et les quatre syndicats représentatifs au sein de l’entreprise ont signé le 7 novembre 2002 un accord d’entreprise maintenant, mais seulement pour les salariés de l’établissement de La Gère, les conditions de rémunération du travail de nuit, du dimanche et des jours fériés, issues de divers accords conclus antérieurement à la fusion au sein de la société Ahlstrom La Gère. Estimant subir une inégalité de traitement, M. X…et M. Y…, affectés à l’établissement de Stenay, ont saisi la juridiction prud’homale.
Pour faire droit à leur demande, l’arrêt retient que l’accord d’entreprise « suite à fusion » motive le maintien des anciens accords par la volonté de la direction, sans autre précision, que l’argument soutenu par le contexte historique ne peut être retenu, aucun nouvel accord d’établissement n’ayant été conclu concernant l’établissement de La Gère postérieurement à la fusion absorption d’une société distincte, de sorte que les anciens accords ne s’appliquaient qu’aux salariés transférés, que si le site de La Gère est géré au niveau du groupe comme un établissement distinct, la traduction juridique en est qu’il s’est agi d’un établissement distinct jusqu’en juin 1997, d’une société distincte entre juillet 1997 et septembre 2002, et à nouveau d’un établissement distinct à partir de septembre 2002, de sorte que les accords collectifs signés en 1999 doivent être considérés au travers de la nature juridique réelle de l’entité signataire concernée, et non en fonction d’une gestion de groupe dans le cadre d’un contexte historique, qu’en maintenant les anciens accords, avant fusion, à l’ensemble des salariés travaillant sur le nouvel établissement de La Gère, soit ceux transférés mais également ceux embauchés postérieurement, les salariés travaillant au sein de l’établissement de Stenay ont fait l’objet d’une disparité de traitement qu’il convient de rémunérer.
En statuant ainsi, la cour d’appel a violé le huitième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, le principe d’égalité de traitement, et l’accord d’entreprise de la société Munksjö Label Pack du 7 novembre 2002.
Les différences de traitement entre salariés appartenant à la même entreprise mais à des établissements distincts, résultant d’accords d’entreprise négociés et signés par les organisations syndicales représentatives au sein de l’entreprise, investies de la défense des droits et intérêts des salariés de l’ensemble de cette entreprise et à l’habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote, sont présumées justifiées.
Droits des affaires, concurrence, distribution et consommation
• Carte bancaire - Fraude. Cass., Com., 25 octobre 2017, N°16-11644.
Après avoir reçu, sur son téléphone portable, deux messages lui communiquant un code à six chiffres dénommé « 3D Secure », destiné à valider deux paiements par internet qu’elle n’avait pas réalisés, Mme X… a, le même jour, fait opposition à sa carte bancaire auprès de la Caisse de crédit mutuel de Calais (la Caisse) dans les livres de laquelle était ouvert son compte. Elle lui a ensuite demandé de lui rembourser la somme qui avait été prélevée sur ce compte à ce titre et de réparer son préjudice moral. Soutenant que Mme X… ne contestait pas avoir, en réponse à un courriel se présentant comme émanant de l’opérateur téléphonique SFR, communiqué à son correspondant des informations relatives à son compte chez cet opérateur, permettant à ce dernier de mettre en place un renvoi téléphonique des messages reçus de la Caisse, ainsi que ses nom, numéro de carte de paiement, date d’expiration et cryptogramme figurant au verso de la carte, la Caisse s’est opposée à sa demande au motif qu’elle avait ainsi commis une négligence grave dans la conservation des dispositifs de sécurité personnalisés mis à sa disposition.
Pour condamner la Caisse à payer à Mme X… la somme de 3 300, 28 euros en remboursement de la somme prélevée sur son compte au titre du paiement litigieux et 1 euro à titre de dommages-intérêts, le jugement retient que si cette dernière a communiqué volontairement les informations relatives à sa carte de paiement, celles-ci ont été détournées à son insu, car communiquées à une personne se présentant sous une fausse identité, et qu’elle n’avait communiqué ni son code confidentiel, ni le code 3D Secure, de sorte qu’il ne peut lui être reproché de ne pas avoir respecté les dispositions de l’article L. 133-16 du code monétaire et financier.
En se déterminant ainsi, sans rechercher, au regard des circonstances de l’espèce, si Mme X… n’aurait pas pu avoir conscience que le courriel qu’elle avait reçu était frauduleux et si, en conséquence, le fait d’avoir communiqué son nom, son numéro de carte bancaire, la date d’expiration de celle-ci et le cryptogramme figurant au verso de la carte, ainsi que des informations relatives à son compte SFR permettant à un tiers de prendre connaissance du code 3D Secure ne caractérisait pas un manquement, par négligence grave, à ses obligations mentionnées à l’article L. 133-16 du code monétaire et financier, la juridiction de proximité a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 133-16 et L. 133-19 du code monétaire et financier.
Dans cette affaire de « hameçonnage », la Cour de cassation censure un jugement qui avait écarté la responsabilité du titulaire d’une carte bancaire pour négligence grave, faute d’avoir établi si ce dernier avait pu avoir conscience que le courriel qu’il avait reçu de la part de l’usurpateur était frauduleux.
• Cautions - Redressement judiciaire. Cass., Com., 25 octobre 2017, N°16-16839.
Confrontée à des difficultés financières, la société AMG Compagnie (la société AMG) a demandé à la société Crédit industriel et commercial (le CIC) de renouveler les lignes de crédits que cette banque lui accordait depuis plusieurs années. Par lettre du 25 février 2011, le CIC a donné son accord au renouvellement de ces crédits, en en modifiant certaines modalités, jusqu’au 31 mai 2011, à la condition que lui soient communiquées, d’ici là, les « situations comptables les plus abouties possible arrêtées au 30 mars 2011 » et que les cautionnements antérieurement souscrits par les deux fondateurs, dirigeants et actionnaires principaux de la société, MM. Méir et Gabriel X…, soient portés à la somme totale en principal de 1 000 000 euros, pour une durée de cinq ans. La société AMG a accepté. Après avoir, dans l’attente de la présentation de la situation comptable demandée, prolongé ses concours jusqu’au 30 juin 2011, le CIC a, au 31 octobre 2011, en se réservant la possibilité de réduire ses niveaux d’engagement par la suite. Le 28 octobre 2011, le CIC a rejeté sans avertissement une lettre de change-relevé tirée sur la société AMG à échéance du 24 octobre 2011 puis, le 4 novembre suivant, a dénoncé l’ensemble des concours qui lui étaient accordés jusqu’au 31 octobre 2011 en mettant la société AMG en demeure de lui régler, sous huitaine, diverses sommes au titre du solde débiteur de ses comptes courants. La société AMG et MM. X…ont assigné le CIC en responsabilité pour rupture abusive et brutale de crédit et en nullité des cautionnements pour absence de cause et vice du consentement. La société AMG a été mise en redressement judiciaire le 10 avril 2012. Le CIC a, le 27 novembre 2012, assigné les cautions en exécution de leurs engagements. La société AMG ayant bénéficié, le 25 juin 2013, d’un plan de redressement, M. Y…, désigné commissaire à l’exécution du plan, est intervenu à la procédure.
D’une part, c’est par une interprétation, exclusive de dénaturation, des termes des lettres adressées par le CIC à la société AMG les 25 février et 1er juillet 2011, que leur ambiguïté rendait nécessaire, que l’arrêt retient que les parties étaient convenues, non de modifier les modalités des concours bancaires mais de leur fixer un terme, en substituant des crédits à durée déterminée à ceux qui étaient précédemment accordés à la société AMG pour une durée indéterminée.
D’autre part, c’est à bon droit que la cour d’appel, qui n’avait pas à effectuer des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a retenu que les concours à durée déterminée n’avaient pas été brutalement rompus ou abusivement dénoncés mais, après un renouvellement, avaient pris fin par la survenance de leur terme, sans qu’il soit nécessaire pour la banque de respecter un préavis.
La décision d’un établissement de crédit de ne pas renouveler un concours revêt un caractère discrétionnaire, de sorte que le banquier n’est responsable du fait d’une telle décision de refus que s’il est tenu par un engagement. Le renouvellement de concours bancaires à durée déterminée succédant à un concours à durée indéterminée, auquel il a été mis fin avec préavis, n’étant pas, à lui seul, de nature à caractériser l’existence d’une promesse de reconduction du crédit au-delà du terme.
Les dispositions de l’article L. 442-6, I, 5° du code de commerce relatives à la responsabilité encourue pour rupture brutale d’une relation commerciale établie ne s’appliquent pas à la rupture ou au non-renouvellement de crédits consentis par un établissement de crédit à une entreprise, opérations exclusivement régies par les dispositions du code monétaire et financier.
L’obligation résultant du cautionnement consenti en garantie du remboursement de concours financiers n’est pas sans cause au sens de l’article 1131 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, du seul fait que ces concours n’auraient été renouvelés que pour une durée de quelques mois, tandis que le cautionnement aurait été souscrit pour une durée de cinq ans.
La décision d’un établissement de crédit de ne pas renouveler un concours revêt un caractère discrétionnaire. Par suite, le banquier n’est responsable du fait d’une telle décision de refus que s’il est tenu par un engagement.
• Consommation - Surendettement. Cass., Civ., 2ème, 19 octobre 2017, N°16-23752.
Une commission de surendettement, après avoir déclaré recevable la demande de Mme X… tendant au traitement de sa situation financière a saisi, à la demande de cette dernière, le juge d’un tribunal d’instance d’une demande de vérification de plusieurs créances dont celle de la société Crédit foncier et communal d’Alsace et de Lorraine-banque (la banque).
Pour écarter de la procédure de surendettement la créance alléguée par la banque au titre d’un prêt, le jugement retient que celle-ci ne produit aucun historique de compte qui puisse permettre de vérifier la forclusion éventuellement encourue.
En statuant ainsi, le juge qui, sous couvert d’une carence dans l’administration de la preuve, a introduit dans le débat le moyen tiré de la forclusion sans avoir invité les parties à présenter leurs observations, a violé les articles L. 331-4 et R. 332-4 du code de la consommation, alors applicables, ensemble l’article 16 du code de procédure civile.
• Bail commercial - Clause résolutoire. Cass., Civ., 2ème, 19 octobre 2017, N°16-11266.
La société civile immobilière Les Chênes rouges (la SCI), propriétaire de locaux à usage commercial donnés à bail à la société Catef, a saisi un tribunal à fin que soit constatée l’acquisition de la clause résolutoire du bail. Un jugement du 20 février 1997, confirmé par un arrêt du 27 septembre 1999, a accueilli la demande de la SCI.
La société Gelied, qui avait consenti à la société Catef des avances de fonds garanties par deux nantissements inscrits sur le fonds de commerce de cette société les 18 avril 1995 et 26 mars 1997, reprochant à la SCI de ne pas lui avoir notifié l’action judiciaire tendant à l’éviction du preneur, l’a assignée en paiement de dommages-intérêts.
Pour déclarer irrecevable la « déclaration d’appel valant déclaration de saisine » de la cour d’appel, l’arrêt retient que la saisine de la cour d’appel de renvoi a été formalisée au nom de la société Gelied, par « déclaration d’appel » du 5 juillet 2012 sur un « arrêt au fond, origine cour d’appel de Nancy, décision attaquée en date du 9 septembre 2009, enregistrée sous le n° » (non précisé) et qu’il était simplement indiqué sur cette déclaration, que l’objet de l’appel tendait « à faire réformer ou annuler par la Cour d’appel la décision entreprise ».
En statuant ainsi, alors que la cour d’appel avait été saisie par un acte qualifié de « déclaration de saisine de la cour d’appel de Nancy sur renvoi après cassation », précisant que M. X…, avocat de la société Gelied, déclarait saisir la cour d’appel de Nancy désignée comme cour de renvoi après cassation d’un arrêt de la cour d’appel de Nancy du 9 septembre 2009 et ce en exécution d’un arrêt de la Cour de cassation du 3 mai 2011 qui avait désigné la cour d’appel de Nancy, autrement composée, comme cour de renvoi, la cour d’appel a en dénaturé les termes clairs et précis.
Pour déclarer irrecevable la déclaration d’appel valant déclaration de saisine de la cour d’appel, l’arrêt retient encore que l’imprécision et l’ambiguïté de la déclaration de saisine par la société Gelied contreviennent manifestement aux prescriptions de l’article 901 du code de procédure civile et ne peut, dans les circonstances de cette espèce, qu’entraîner la nullité car faisant nécessairement grief à l’intimée, empêchée de préparer sa défense utilement dans un contexte procédural protéiforme durant depuis de longues années entre les parties et que ce défaut de saisine régulière ne constitue pas une exception de procédure mais une fin de non-recevoir susceptible d’être présentée en tout état de cause sans que celui qui l’invoque ait à justifier d’un grief.
En statuant ainsi, alors qu’affectant le contenu de l’acte de saisine de la juridiction et non le mode de saisine de celle-ci, l’irrégularité des mentions de la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi après cassation ne constitue pas une cause d’irrecevabilité de celle-ci, mais relève des nullités pour vice de forme, la cour d’appel a violé les articles 112 et 122 du code de procédure civile.
• Résidence de tourisme - Compte d’exploitation. Cass., Civ., 3ème, 19 octobre 2017, N°16-21460.
Les consorts X… et autres, propriétaires d’appartements situés dans une résidence de tourisme et donnés à bail à la société Appart’city, ont sollicité la communication des comptes d’exploitation et bilans pour les années 2013 et 2014.
La société Appart’city fait grief à l’arrêt d’accueillir cette demande, alors, selon le moyen, que les comptes d’exploitation à transmettre aux propriétaires qui en font la demande ne sont pas les comptes d’exploitation détaillés comportant tout le détail des modalités d’exploitation de la résidence, sauf à contraindre l’exploitant à dévoiler ses méthodes de gestion protégées par le secret des affaires. En décidant le contraire, la cour d’appel a violé l’article L. 321-2 du code du tourisme.
Ayant exactement retenu que le compte d’exploitation, qui n’est communiqué que si les propriétaires en font la demande, ne peut être constitué d’un simple extrait du bilan, qui leur est obligatoirement adressé chaque année, et doit comporter un détail des charges variables et des charges fixes, la cour d’appel a pu en déduire que le compte d’exploitation produit par la société Appart’city, qui se bornait à reproduire quelques éléments comptables du bilan annuel, ne respectait pas les dispositions de l’article L. 321-2 du code du tourisme.
• Consommation - Action en justice des associations de consommateurs. Cass., Com., 18 octobre 2017, N°16-10271.
Mme X…, cliente de la société Banque populaire Rives de Paris (la banque), a procédé, par l’intermédiaire de cette dernière, à l’achat d’actions Natixis proposées à la vente dans le cadre d’une offre publique à prix ouvert. Se prévalant d’un manquement de la banque à ses obligations, Mme X… l’a assignée en paiement de dommages-intérêts. L’association UFC Que choisir est intervenue volontairement à l’instance.
Après avoir énoncé que les dispositions de l’article L. 421-7 du code de la consommation permettent aux associations de consommateurs agréées d’intervenir devant les juridictions civiles lorsque la demande initiale a pour objet la réparation d’un préjudice subi par un ou plusieurs consommateurs à raison de faits de fourniture d’un bien ou d’un service non constitutifs d’une infraction pénale, la cour d’appel en a exactement déduit que l’association UFC Que choisir était recevable à intervenir dans l’instance en responsabilité introduite par Mme X…, au titre de la prestation fournie, contre la banque dont elle était cliente.
Pour condamner la banque à payer des dommages-intérêts à Mme X… et à l’association UFC Que choisir, l’arrêt retient que si Mme X… a reconnu avoir pris connaissance avant l’achat des actions du prospectus visé par l’Autorité des marchés financiers, constitué notamment de la note d’opération qui contient le résumé du prospectus et en particulier des facteurs de risques décrits dans le prospectus, cette note de quatre-vingt-dix pages n’est pas adaptée à l’expérience personnelle et à la compréhension du consommateur moyen qu’est Mme X…, ancienne secrétaire médicale.
En statuant ainsi, alors qu’elle avait relevé que Mme X… possédait un compte titres ouvert en 1984 dans les comptes de la banque, qu’elle gérait elle-même et qui lui avait permis de constater que le prix des actions était susceptible d’évoluer à la hausse comme à la baisse, et que le prospectus visé par l’Autorité des marchés financiers, dont elle avait pris connaissance, mentionnait les facteurs de risques, précisant que le cours des actions de la société Natixis pourrait être très volatil et être affecté par de nombreux événements concernant la société, ses concurrents, ou le marché financier en général et le secteur bancaire en particulier, ce dont il résultait que la banque avait délivré à sa cliente une information appropriée sur le risque de perte attaché à la souscription de ces actions, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l’article L. 533-4 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable en la cause, et l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016.
Une association de consommateurs, telle que UFC Que choisir, est recevable à intervenir dans l’instance en responsabilité introduite par une cliente, au titre de la prestation fournie, à savoir la vente d’actions dans le cadre d’une offre publique, contre la banque dont elle était cliente.
• Caution hypothécaire - Action en nullité. Cass., Civ., 1ère, 18 octobre 2017, N°16-17184.
D’une part, avant l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, l’action en nullité d’une sûreté accordée par une société civile en garantie de la dette d’un associé, qui vise à faire constater une nullité absolue, était soumise à la prescription trentenaire de l’article 2262 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, d’autre part, selon l’article 26- II de la loi susvisée, les dispositions qui réduisent le délai de la prescription s’appliquent aux prescriptions à compter du jour de l’entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
La société civile immobilière La Molière (la SCI) a été constituée par Mme X…, épouse Y… , M. Y… et leurs filles Delphine et Emilie. Le 27 janvier 2005, M. Y… a souscrit un contrat de prêt, en son nom personnel, auprès de M. Z…En garantie du remboursement de ce prêt, la SCI, autorisée par décision de l’assemblée générale des associés du 29 janvier 2005, s’est, par acte authentique du 7 février 2005, rendue caution de M. Y… , avec affectation hypothécaire de l’immeuble dont elle était propriétaire. M. Y… s’étant révélé défaillant, M. Z…a fait valoir le cautionnement hypothécaire contre la SCI, qui l’a assigné en annulation de la sûreté.
Pour déclarer cette action prescrite, l’arrêt retient qu’elle est fondée sur un vice affectant l’acte de cautionnement, en ce qu’il n’entrerait pas dans l’objet social, et non sur une irrégularité de la délibération de l’assemblée générale des associés ayant autorisé cet engagement de la société, et qu’en conséquence, l’action engagée n’est pas soumise à la prescription triennale de l’article 1844-14 du code civil, mais à la prescription de droit commun de cinq ans édictée par l’article 1304 du code civil en matière de vice du consentement, en ce qu’elle se fonde sur l’erreur quant au caractère et à la portée du cautionnement souscrit. L’arrêt ajoute que la nullité invoquée est une nullité relative, car elle vise à protéger les intérêts de la SCI.
En statuant comme elle l’a fait, alors que l’action en nullité de la caution hypothécaire souscrite le 7 février 2005, qui avait été engagée le 4 juin 2012, était soumise à la prescription trentenaire, réduite à cinq ans par la loi du 17 juin 2008, laquelle n’était pas acquise au jour de l’entrée en vigueur de cette loi, de sorte que l’action n’était pas prescrite à la date de l’introduction de l’instance, la cour d’appel a violé l’article 1304, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, l’article 2262 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, et l’article 26- II de la même loi.
• Actions gratuites - Contribution sociales. Cass., Civ., 2ème, 12 octobre 2017, N°16-21686.
Ayant mis en œuvre un plan d’attribution gratuite d’actions en faveur de l’ensemble des membres de son personnel à l’exception du président-directeur général et des membres du comité exécutif, la société France télécom, devenue la société Orange (la société), s’est acquittée, en août 2011, de la contribution prévue par l’article L. 137-13 du code de la sécurité sociale auprès de l’URSSAF du Bas-Rhin, aux droits de laquelle vient l’URSSAF d’Alsace (l’URSSAF). Elle a demandé à celle-ci, le 19 juillet 2013, si elle pourrait solliciter le remboursement des sommes versées au cas où les conditions d’attribution des actions ne seraient pas acquises au 31 décembre 2013. L’URSSAF ayant répondu par la négative, la société a saisi une juridiction de sécurité sociale aux fins d’annulation de cette décision et a présenté une demande en remboursement de la contribution versée.
Se prononçant par une décision n° 2017-627/628 QPC du 28 avril 2017 sur les questions prioritaires de constitutionnalité de la société Orange transmises par le Conseil d’Etat statuant au contentieux et la Cour de cassation, le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les mots « ou des actions » figurant dans la seconde phrase du paragraphe II de l’article L. 137-13 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007 de financement de la sécurité sociale pour 2008.
Il résulte de l’article L. 137-13 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, applicable au litige, que le fait générateur de la contribution instituée, au profit des régimes obligatoires d’assurance maladie dont relèvent les bénéficiaires, sur les actions attribuées gratuitement dans les conditions prévues aux articles L. 225-197-1 à L. 225-197-5 du code de commerce est constitué par la décision d’attribution de celles-ci, même assortie de conditions.
Selon l’article L. 137-13, II du code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, applicable au litige, la contribution patronale sur les actions attribuées gratuitement est exigible le mois suivant la décision d’attribution de celles-ci. Il résulte de la réserve d’interprétation énoncée par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2017-627/628 QPC du 28 avril 2017 que cette disposition ne fait pas obstacle à la restitution de cette contribution lorsque les conditions auxquelles l’attribution des actions gratuites était subordonnée ne sont pas satisfaites.
Pour débouter la société Orange de ses demandes, l’arrêt retient que la non-réalisation de la condition de performance à laquelle l’attribution des actions était subordonnée ne rend pas indue la contribution litigieuse. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé.
• Créances professionnelles - Convention de cession. Cass. Com., 11 octobre 2017, N°15-18372.
En application d’une convention d’escompte de créances professionnelles, la société SMLS a, par bordereau de cession de créances du 31 mars 2009, cédé à la société Crédit du Nord (le cessionnaire) les créances qu’elle détenait sur la société Air France correspondant à trois factures du 16 mars 2009, cette cession étant notifiée à cette dernière par lettres recommandées du 1er avril 2009. Après avoir, le 15 mai 2009, payé les factures à la société SMLS, la société Air France a été assignée en paiement par le cessionnaire. Elle a invoqué la nullité de la cession et soutenu, à titre subsidiaire, que lui était inopposable cette cession effectuée en méconnaissance des stipulations du marché conclu avec la société SMLS selon lesquelles "toute cession de créance à une banque ou à une société de factoring intervenant et présentée sans le préavis minimal d’un mois sera réputée nulle et non avenue" et qui ne lui a pas été notifiée au domicile qu’elle avait élu selon d’autres stipulations de ce marché.
Après avoir constaté que le bordereau comportait la mention des articles L. 313-23 à L. 313-34 du code monétaire et financier, exigée par l’article L. 313-23, 2° dudit code, mais aussi celle, non exigée, des articles R. 313-15 à R. 313-18, l’arrêt retient à bon droit que l’ajout de ces textes réglementaires, fussent-il abrogés, n’a pas d’incidence sur la validité de la cession.
Ayant retenu que la société Air France avait eu une connaissance effective de la notification de la cession et ne pouvait se méprendre sur les conséquences de celle-ci, la cour d’appel a pu en déduire qu’il importait peu que cette notification n’ait pas été effectuée au domicile élu par la société Air France dans le marché de travaux.
Enfin, une cession de créance professionnelle effectuée selon les modalités prévues par les articles L. 313-23 et suivants du code monétaire et financier produit ses effets et est opposable aux tiers ainsi qu’au débiteur cédé dans les conditions prévues par ces dispositions légales, auxquelles aucune autre condition ne peut être ajoutée dans le contrat générateur de la créance. Par ce motif de pur droit, substitué, après avertissement délivré aux parties, à ceux critiqués, la décision se trouve justifiée.
Une cession de créance professionnelle produit ses effets et est opposable aux tiers ainsi qu’au débiteur cédé dans les conditions prévues par ces dispositions légales, auxquelles aucune autre condition ne peut être ajoutée dans le contrat générateur de la créance.
• Bail commercial - Valeur locative. Cass., Civ., 3ème, 5 octobre 2017, N°16-18059.
Le groupement foncier agricole, Domaine de Cassafières (le bailleur) a consenti à la société Détente et loisirs (la locataire) un bail commercial, d’une durée de seize années et demi à compter du 1er septembre 1994, relatif à un terrain permettant l’exploitation d’un fonds de commerce de camping. Le 30 juin 2010, le bailleur a délivré un congé avec offre de renouvellement moyennant un loyer annuel d’un certain montant, puis a assigné la locataire en fixation du loyer à ce montant. Un arrêt définitif du 26 novembre 2013 a dit que le bail portait sur un bien en vue d’une seule utilisation au sens de l’article R. 145-10 du code de commerce, fixé un loyer provisionnel et ordonné une mesure d’instruction. La locataire, se prévalant des améliorations qu’elle a financées au cours du bail venant à renouvellement, a sollicité un abattement de ce chef lors de la fixation du loyer du bail renouvelé.
La soumission du bail aux dispositions de l’article R. 145-10 du code de commerce relatif à la fixation du loyer de locaux construits en vue d’une seule utilisation exclut l’application des dispositions de l’article R. 145-8 du même code. Ayant relevé que le bail portait sur un bien loué en vue d’une seule utilisation au sens du premier de ces textes, la cour d’appel, abstraction faite d’un motif erroné mais surabondant, a retenu, à bon droit, que le loyer devait être fixé à la valeur locative selon les usages observés dans la branche d’activité considérée.
Le loyer de locaux construits en vue d’une seule utilisation doit être fixé à la valeur locative selon les seuls usages observés dans la branche d’activité considérée.
Libertés publiques - Droit humanitaire et des étrangers
• Statut de réfugié - Protection subsidiaire. CE, 23 octobre 2017, 10ème - 9ème Ch. réunies, N°374106.
Ni le principe d’impartialité qui s’impose à toute juridiction, ni aucune règle générale de procédure ne s’oppose à ce que les juges qui se sont prononcés sur une première demande d’admission au statut de réfugié ou au bénéfice de la protection subsidiaire délibèrent à nouveau sur une demande des mêmes personnes tendant au réexamen de leur demande initiale.
• RSA - Conditions de ressources. CE, 20 octobre 2017, 1ère - 6ème Ch. réunies, N° 405572.
Il résulte des articles L. 262-2, R. 262-5 et R. 262-37 du code de l’action sociale et des familles (CASF) que, pour bénéficier de l’allocation de revenu de solidarité active (RSA), une personne doit remplir la condition de ressources qu’ils mentionnent et résider en France de manière stable et effective. Pour apprécier si cette seconde condition est remplie, il y a lieu de tenir compte de son logement, de ses activités, ainsi que de toutes les circonstances particulières relatives à sa situation, parmi lesquelles le nombre, les motifs et la durée d’éventuels séjours à l’étranger et ses liens personnels et familiaux.
La personne qui remplit les conditions pour bénéficier de l’allocation de revenu de solidarité active a droit, lorsqu’elle accomplit hors de France un ou plusieurs séjours dont la durée de date à date ou la durée totale par année civile n’excède pas trois mois, au versement sans interruption de cette allocation. En revanche, lorsque ses séjours à l’étranger excèdent cette durée de trois mois, le RSA ne lui est versé que pour les mois civils complets de présence en France. En toute hypothèse, le bénéficiaire du RSA est tenu de faire connaître à l’organisme chargé du service de la prestation, outre l’ensemble des ressources dont il dispose, sa situation familiale et tout changement en la matière, toutes informations relatives au lieu de sa résidence, ainsi qu’aux dates et motifs de ses séjours à l’étranger lorsque leur durée cumulée excède trois mois
Lorsque les séjours à l’étranger du bénéficiaire du revenu de solidarité active (RSA) excèdent trois mois, le revenu ne lui est versé que pour les mois civils complets en France.
• Etranger - Aide juridictionnelle. CE, 16 octobre 2017, 2ème - 7ème Ch. réunies, N° 411169 (Avis).
L’étranger, informé par la notification de la décision de transfert de la possibilité de la contester dans un délai de quarante-huit heures devant le tribunal administratif, peut, dès la saisine de ce tribunal par une requête susceptible d’être motivée même après l’expiration du délai de recours, demander à son président le concours d’un interprète et que lui soit désigné d’office un avocat. Ce délai de recours n’est susceptible d’aucune prorogation
Dès lors, l’introduction d’une demande d’aide juridictionnelle, alors que l’étranger dispose de la faculté de demander au président du tribunal la désignation d’office d’un avocat, ne saurait avoir pour effet de proroger le délai de quarante-huit heures mentionné au III de l’article L. 512-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), auquel renvoie le II de l’article L. 742-4 de ce code.
Pour rendre opposable le délai de recours contentieux, conformément à ce que prévoit l’article R. 421-5 du code de justice administrative (CJA), l’administration est tenue de faire figurer dans la notification de ses décisions la mention des délais et voies de recours contentieux ainsi que les délais des recours administratifs préalables obligatoires. Elle n’est pas tenue d’ajouter d’autres indications, comme notamment les délais de distance, la possibilité de former des recours gracieux et hiérarchiques facultatifs ou la possibilité de former une demande d’aide juridictionnelle. Si des indications supplémentaires sont toutefois ajoutées, ces dernières ne doivent pas faire naître d’ambiguïtés de nature à induire en erreur les destinataires des décisions dans des conditions telles qu’ils pourraient se trouver privés du droit à un recours effectif
Aucune mention relative à l’aide juridictionnelle n’est requise dans la notification des décisions de transfert assorties d’une assignation à résidence pour faire courir le délai de recours de quarante-huit heures. L’indication de la faculté pour le requérant de demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné à cette fin qu’un conseil lui soit désigné d’office, conformément à ce que prévoient les dispositions du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, n’est pas de nature à induire en erreur les intéressés.
• Etrangers - Qualité de réfugié - Visa. CE, 2ème - 7ème Ch. réunies, 16 octobre 2017, N°408374.
Si le droit constitutionnel d’asile a pour corollaire le droit de solliciter en France la qualité de réfugié, les garanties attachées à ce droit reconnu aux étrangers se trouvant sur le territoire de la République n’emportent aucun droit à la délivrance d’un visa en vue de déposer une demande d’asile en France ou pour y demander le bénéfice de la protection subsidiaire prévue à l’article L. 712-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Dans les cas où l’administration peut légalement disposer d’un large pouvoir d’appréciation pour prendre une mesure au bénéfice de laquelle l’intéressé ne peut faire valoir aucun droit, il est loisible à l’autorité compétente de définir des orientations générales pour l’octroi de ce type de mesures sans que l’intéressé puisse se prévaloir de telles orientations à l’appui d’un recours formé devant le juge administratif. Il s’ensuit que les orientations générales arrêtées par les autorités françaises en vue de l’accueil en France de certains personnels civils recrutés localement pour servir auprès des forces françaises en Afghanistan ne peuvent être invoquées à l’appui d’un recours devant le juge administratif contre un refus de visa.
European Court of Justice
• Reference for a preliminary ruling — Citizenship of the Union — Article 21 TFEU — Directive 2004/38/EC — Beneficiaries — Dual nationality — Union citizen having acquired the nationality of the host Member State while retaining her nationality of origin — Right of residence in that Member State of a third-country national who is a family member of the Union citizen. ECJ, 14 November 2017, Case C-165/16, Toufik Lounes v. Secretary of State for the Home Department.
Directive 2004/38/EC of the European Parliament and of the Council of 29 April 2004 on the right of citizens of the Union and their family members to move and reside freely within the territory of the Member States amending Regulation (EEC) No 1612/68 and repealing Directives 64/221/EEC, 68/360/EEC, 72/194/EEC, 73/148/EEC, 75/34/EEC, 75/35/EEC, 90/364/EEC, 90/365/EEC and 93/96/EEC must be interpreted as meaning that, in a situation in which a citizen of the European Union (i) has exercised his freedom of movement by moving to and residing in a Member State other than that of which he is a national, under Article 7(1) or Article 16(1) of that directive, (ii) has then acquired the nationality of that Member State, while also retaining his nationality of origin, and (iii) several years later, has married a third-country national with whom he continues to reside in that Member State, that third-country national does not have a derived right of residence in the Member State in question on the basis of Directive 2004/38.
The third-country national is however eligible for a derived right of residence under Article 21(1) TFEU, on conditions which must not be stricter than those provided for by Directive 2004/38 for the grant of such a right to a third-country national who is a family member of a Union citizen who has exercised his right of freedom of movement by settling in a Member State other than the Member State of which he is a national.
• Reference for a preliminary ruling — Protection of the safety and health of workers — Directive 2003/88/EC — Article 5 — Weekly rest period — National legislation providing for at least one rest day per seven-day period — Periods of more than six consecutive working days. ECJ, 9 November 2017, Case C 306/16, António Fernando Maio Marques da Rosa v. Varzim Sol — Turismo, Jogo e Animação SA.
Article 5 of Council Directive 93/104/EC of 23 November 1993 concerning certain aspects of the organisation of working time, as amended by Directive 2000/34/EC of the European Parliament and of the Council of 22 June 2000 and the first paragraph of Article 5 of Directive 2003/88/EC of the European Parliament and of the Council of 4 November 2003 concerning certain aspects of the organisation of working time must be interpreted as not requiring the minimum uninterrupted weekly rest period of 24 hours to which a worker is entitled to be provided no later than the day following a period of six consecutive working days, but requires that rest period to be provided within each seven-day period.