L’information revêt une importance considérable dans notre société considérée comme la société de l’information. Cette information, poumon du numérique est une pierre précieuse pour l’entreprise qui se veut compétitive. Dans cette dynamique est née l’intelligence économique marquée par l’information stratégique, laquelle est une arme pour toute entreprise.
L’entreprise est marquée comme tout Être humain par trois étapes à savoir sa naissance (création), sa vie et sa fin. Mais après sa création, bien que l’on sache que celle-ci aura une fin, ce qui est important c’est d’assurer sa pérennité, son développement.
Comme un parti politique dont le but est la conquête et l’exercice du pouvoir politique, l’entreprise quel que soit son objet a pour objectif d’être compétitive en vue de l’obtention de parts significatives sur le marché. Pour ce faire, des stratégies tant légales qu’illégales (parasitisme, concurrence déloyale…) sont mises en place pour atteindre cet objectif.
Il existe des moyens permettant à l’entreprise d’être dominante sur le marché lesquels moyens sont encadrés par des règles juridiques d’où le droit de l’intelligence économique qui est de nos jours incontournable pour toute entreprise qui se veut compétitive. Mais la définition du droit de l’intelligence économique étant tributaire de la notion d’intelligence économique, il se pose donc la question suivante : qu’est-ce que l’intelligence économique ?
« L’intelligence économique vise à collecter, analyser, valoriser, diffuser et protéger l’information économique stratégique ». C’est en ces termes qu’est définie l’intelligence économique par une communication du Premier ministre en date du 23 mai 2013, qui précise sa nature, ses objectifs et les principales orientations de l’État en la matière, sous la responsabilité de la Délégation interministérielle à l’Intelligence économique (dite D2IE).
La notion d’intelligence économique ne bénéficiant d’une définition consacrée de façon textuelle ou universelle, d’autres définitions de l’intelligence économique existent, mais toutes s’accordent à démontrer l’importance de l’information dans l’élaboration de la stratégie d’entreprise.
C’est notamment le cas avec cette définition selon laquelle “L’intelligence économique peut être définie comme l’ensemble des actions coordonnées de recherche, de traitement et de distribution, en vue de son exploitation, de l’information utile aux acteurs économiques. Ces diverses actions sont menées légalement avec toutes les garanties de protection nécessaires à la préservation du patrimoine de l’entreprise, dans les meilleures conditions de délais et de coûts. L’information utile est celle dont ont besoin les différents niveaux de décision de l’entreprise ou de la collectivité, pour élaborer et mettre en œuvre de façon cohérente la stratégie et les tactiques nécessaires à l’atteinte des objectifs définis par l’entreprise dans le but d’améliorer sa position dans son environnement concurrentiel. Ces actions, au sein de l’entreprise, s’ordonnent autour d’un cycle ininterrompu, générateur d’une vision partagée des objectifs de l’entreprise.”
Toutes les définitions proposées de cette notion mettent indubitablement en évidence « l’information ». Il convient donc de s’appesantir sur la valeur de l’information en intelligence économique, laquelle information dite stratégique revêt un caractère pécuniaire et une importance non négligeables. Du fait de la valeur indiscutable de l’information dans notre siècle présent, l’intelligence économique est encadrée par un ensemble de règles juridiques qui forment le droit de l’intelligence économique pour contrôler les usages dans l’exercice de l’activité commerciale. Dans cet article, il s’agira de présenter l’objet de l’intelligence économique (1), avant de signifier le caractère indispensable du respect des règles juridiques relatives à ce domaine (2).
1- L’objet de l’intelligence économique : l’information stratégique.
Dans un monde hyperconnecté où les informations de toutes sortes circulent sans frontière et sans filtre, leur maîtrise est devenue un enjeu capital pour les administrations et les entreprises. C’est l’une des grandes conclusions du premier Sommet de l’intelligence économique et de la sécurité, qui s’est déroulé du 4 au 6 juin 2015 à Chamonix-Mont-Blanc. Savoir qualifier et protéger ses informations stratégiques, mais aussi normaliser leurs usages pour gagner en capacité d’influence, constitue aujourd’hui des facteurs de compétitivité et de puissance incontournables.
Comme signifié ci-dessus, l’entreprise à sa création a en vue d’assurer sa pérennité par l’obtention d’une position dominante sur le marché ou du moins dans le but d’être une référence dans son domaine d’activité. Dans cette quête de position favorable, il existe une diversité de moyens permettant à l’entreprise d’atteindre son objectif. C’est dans cette atmosphère que l’intelligence économique s’avère une arme incontournable.
L’intelligence économique (IE) est l’outil indispensable qui permet de protéger et de maîtriser l’information stratégique.
Au cœur de l’intelligence économique se trouve l’information stratégique encore appelée « information essentielle ». L’information avant d’être stratégique est d’abord une information, laquelle mérite d’être définie.
Pour Pascal Petit (1998), « la notion d’information renvoie de prime abord à tout ce qui, dans notre environnement, est perceptible et transmissible à autrui, soit, dans le langage de la cybernétique, tout ce qui permet de positionner les systèmes. »
Il convient toutefois de noter que dans le cadre de l’intelligence économique, l’information au sens large telle que définie ci-dessus n’est pas négligeable dans la mesure où comme le précise le Pr. Roch DAVID : « l’information n’est jamais neutre, elle a forcément une couleur ».
Cette importance de l’information se note dans un monde marqué par la donnée, un monde dans lequel les informations collectées via des technologies notamment le Big Data, sont mises en relation pour déterminer des résultats utiles à l’entreprise. Une information paraissant anodine à la collecte pourrait se muer en information stratégique pour l’entreprise d’où la guerre de l’information existant entre les entreprises. L’information stratégique est donc une information essentielle, une information ou donnée évaluable en argent laquelle peut être comptabilisée à l’actif du bilan de l’entreprise et faire ainsi partie de son patrimoine informationnel.
Le caractère patrimonial de l’information stratégique pousse les entreprises à mettre en œuvre des mesures de sécurité assez développées dans le but de protéger leurs informations, lesquelles sont la condition sine qua non du maintien de l’entreprise dans la compétition. C’est d’ailleurs ce caractère patrimonial ou cette valeur vénale de l’information dont la possession est synonyme de pouvoir qui a poussé le législateur à réglementer ce domaine notamment avec les facilités offertes par l’usage des Technologies de l’Information et de la Communication dans la recherche et l’obtention de l’information stratégique ou essentielle.
2- Du respect du Droit de l’Intelligence économique.
Si l’intelligence économique est indispensable pour toute entreprise ou du moins pour toute entreprise sérieuse désireuse d’être compétitive, le respect des règles en la matière l’est encore plus. Il y a un adage connu de tous qui dit : « le droit n’est pas tout mais le droit est partout ». Cet adage traduit le caractère indispensable de la consultation ou de la présence des juristes spécialistes pour conseiller utilement les entreprises dans la recherche d’informations stratégiques.
En effet, l’absence d’informations stratégiques dans le patrimoine informationnel de l’entreprise est synonyme de disparition de celle-ci. Avec une information stratégique, une entreprise peut court-circuiter son concurrent ou une entreprise dominante. Toutefois, cette pratique doit se faire dans le strict respect des dispositions légales.
Avec les TIC, c’est tous les aspects de la vie qui ont été repensés. En ce qui concerne les infractions commises au moyen ou sur les réseaux de communication électronique (cybercriminalité), certaines infractions classiques comme le vol ont dû être adaptées aux nouvelles technologies. Ainsi, dans la recherche d’information stratégique notamment à travers les stratégies offensives d’obtention d’information, user de stratagèmes pour s’introduire dans le système d’un concurrent pour y collecter des informations stratégiques notamment des informations noires qui sont des informations sensibles est constitutif d’infraction notamment de vol d’information. Le chapitre 3 de de la loi ivoirienne de 2013 relative à la lutte contre la cybercriminalité prévoit d’ailleurs des infractions spécifiques aux TIC pour sanctionner ces manquements.
En ayant accès à un système qui aurait dû être protégé, en le sachant, en demeurant à l’intérieur de ce système après avoir recouru à des procédés qui visent à identifier ces failles, le veilleur serait alors dans l’illégalité. En récupérant des documents et en les partageant, il l’est « encore plus »… C’est ce qu’a rappelé l’arrêt de la cour d’appel du 5 février 2014 dans « l’affaire Bluetouff ».
En tout état de cause, faut-il signifier que la sanction du fait en cause sera le plus souvent fonction de la couleur de l’information (blanche, grise ou noire) et du mode d’obtention de ladite information.
Il existe toutefois, des méthodes légales d’obtention des informations stratégiques notamment des techniques légales et judiciaires d’obtention des informations. Ces méthodes sont des possibilités importantissimes pour obtenir les informations stratégiques, toutefois il faut savoir les mettre en œuvre.
Il est de ce fait important d’avoir les personnes appropriées (juristes spécialistes) pour conseiller utilement les entreprises et mettre en place les méthodes adéquates pour obtenir les informations essentielles en toute légalité en vue d’assurer la compétitivité de l’entreprise car une chose est de rechercher l’information à l’endroit et au moment adéquats mais une autre est d’utiliser les moyens légaux pour les avoir.
Désiré Allechi,
Juriste Spécialiste du Droit des TIC.