Lors d’une reprise de franchise, il existe des risques spécifiques pour le repreneur. Pascal Ferron, vice-président de Baker Tilly France, donne ici aux repreneurs potentiels les clés d’analyse les plus importantes.
Le rachat d’une franchise est un acte paradoxal. D’un côté, racheter une franchise est rassurant. En effet, le business model est établi ainsi que l’étude de marché. Le franchisé en herbe dispose donc d’éléments de comparaison avec d’autres franchisés qui ont la même activité et qui peuvent être dans des zones géographiques présentant des similitudes.
D’un autre côté, le risque le plus important est lié au franchiseur lui-même.
Voici les éléments à prendre en compte lors du projet de rachat d’une franchise.
La clause « intuitu personae ».
Le contrat de franchise inclut généralement une clause intuitu personae, selon laquelle le franchiseur impose au franchisé, lorsqu’il vend, de pouvoir donner son avis sur le choix du repreneur et même, éventuellement, changer certaines des clauses du contrat de franchise pouvant le rendre moins attrayant pour le repreneur. Il semble naturel que le franchiseur souhaite adouber le repreneur, le choisir en fonction de son profil et de ses potentiels pour pouvoir lui faire adopter sa propre stratégie future.
Par conséquent, le business model du repreneur peut s’avérer différent de celui du cédant.
Ce qui signifie également que la plupart du temps, dans ce cas de figure, c’est une discussion tripartite qui s’engage, entre le repreneur, le cédant et le franchiseur. Et c’est souvent le franchiseur qui en fixe les règles.
La préférence pour des franchisés existants.
Le candidat repreneur peut se retrouver en concurrence avec d’autres franchisés de l’enseigne qui souhaitent étendre leur territoire géographique en ouvrant d’autres magasins. Le franchiseur peut être tenté de les privilégier, car ils ont fait leurs preuves, contrairement à un nouvel entrant.
Ne parlons même pas du risque « classique » de copinage par lequel le franchiseur va imposer au franchisé cédant son propre candidat, à son prix, et donc « doubler » les candidats trouvés initialement par le franchisé cédant.
Rachat du franchiseur et changement de stratégie.
Un autre risque est lié au fait que le franchiseur puisse décider de vendre sa franchise. Dans ce cas, la stratégie de la franchise peut changer et le franchisé se retrouve pieds et poings liés face à cette nouvelle stratégie qui n’est plus celle qu’il a choisie lors de l’achat initial. Ceci est valable également pour les concessionnaires, revendeurs, agents exclusifs, etc. d’un fabricant unique.
Par ailleurs, souvent, le franchiseur est le principal fournisseur avec les risques suivants : manque d’innovation, baisse de créativité, manque de soutien sur le plan marketing et publicitaire, manque de soutien logistique, pas de renégociation pour les achats, voire gourmandise toujours plus importante sur les taux de commissionnement, de redevances et autres participations publicitaires. Autant d’éléments qui vont peser sur la marge du franchisé racheté et obèreront d’autant sa capacité de remboursement de la dette d’acquisition.
Attention à l’analyse de ses compétences.
Le candidat à la reprise d’une franchise, comme pour toute autre reprise, devra prendre le temps de faire l’analyse de ses propres compétences clés et des domaines pour lesquels il devra se faire accompagner. Les problématiques de taille sont également les mêmes que pour n’importe quelle entreprise à reprendre. Pour reprendre un salon de coiffure en franchise avec un apprenti, il faut obligatoirement être soi-même coiffeur, tandis que pour un salon de coiffure avec une quinzaine de salariés, ce sont les compétences managériales et de marketing qui commencent à primer.
Un contexte plus rassurant pour les banques.
Du point de vue financier, le rachat d’un franchisé est plus rassurant pour une banque, parce qu’un business model plus établi existe, qui offre une meilleure visibilité. Bien évidemment, cela va dépendre beaucoup de la notoriété du franchiseur. En outre, il n’est pas rare que le franchiseur ait passé des accords avec certaines banques pour faciliter cette transmission de franchisés, sur la base de business plans bien rodés et argumentés.
Des aides au financement sont possibles.
Le franchiseur peut aider à la transmission de la franchise et organiser le processus de transmission de ses franchisés. Il peut apporter, dans la transmission du contrat de franchise, des « liants » pour que l’opération se réalise dans de bonnes conditions pour les deux parties.
Par exemple, pour le repreneur, on peut imaginer un crédit-vendeur porté totalement (il ne faut pas trop rêver quand même) ou partiellement par la franchise, ou, dans certaines franchises, une mutualisation des franchisés existants pour garantir les nouveaux arrivants auprès des banques.
Et pour le cédant, le franchiseur peut jouer les intermédiaires et trouver la personne avec qui le cédant va négocier. Il peut également, pour le cédant, organiser une cession « en biseau » qui lui permettra de conserver pendant quelque temps une activité au sein de la tête de réseau.
En résumé, il existe toute une palette de possibilités combinées, beaucoup plus nombreuses que lorsqu’on négocie « one to one » pour la reprise d’une entreprise classique, laissant moins de place à la créativité mais permettant de mieux fiabiliser l’opération.
Source : Baker Tilly France.